Friends of the Richelieu. A river. A passion.



"Tout cedit pays est fort uny, remply de forests, vignes & noyers. Aucuns Chrestiens n'estoient encores parvenus jusques en cedit lieu, que nous, qui eusmes assez de peine à monter le riviere à la rame. " Samuel de Champlain


"All this region is very level and full of forests, vines and butternut trees. No Christian has ever visited this land and we had all the misery of the world trying to paddle the river upstream." Samuel de Champlain

Friday, October 17, 2014

L'argent, la mort et le danger dans la capitale du fracking en Dakota du Nord

photo: Steve Oehlenschlager

Vous savez le pétrole qui a brûlé dans le désastre de Lac-Mégantic? Oui, celui qui provient des exploitations au Dakota du Nord grâce à la fracturation hydraulique?

Vous pensez que les trains de la mort sont effrayants? Imaginez vivre où ce produit est sorti de la roche-mère grâce à la technique d'extraction la plus violente jamais inventée par l'homme.

Voici ma traduction libre du témoignage d'une personne qui est allée sur place pour s'en rendre compte par elle-même. Pas aussi effrayant que le désastre de Lac-Mégantic, mais plus insidieux...


Dès 21h en cette soirée d'août, quand je suis arrivée sur mon premier shift comme serveuse chez Whispers, l'un des deux clubs de danseuses au centre-ville de Williston, je ne m'attendais pas à ce qu'un jeune homme de 25 ans soit battu à mort juste devant l'établissement. C'est vrai que je ne m'attendais pas à la plupart des choses que j'ai vu en faisant ce reportage cet été sur le boom pétrolier dans la partie ouest du Dakota du Nord.

"Peux-tu prendre le plancher en charge?" crie l'autre serveuse vers 22h pendant qu'elle se glisse, vêtue d'un chandail raccourci, derrière le bar pour que les barmans et les bras puissent sortir dehors pour s'occuper de la cohue dehors. Je me suis concentrée à servir les Miller Lites et les verres de Fireball avec vigueur. Je ne savais pas qui se battaient, mais j'ai présumé que c'était l'un de mes clients les moins appréciés de la soirée: deux jeunes frères qui sautaient devant la scène, prenant leurs testicules à pleine main comme le font les garçons blancs qui émulent Eminem et qui ont trop bu. L'un avait un buzz cut, une coupe de cheveux à ras sur les côtés de la tête mais laissant les cheveux longs sur le dessus, et l'autre avait les cheveux doux comme de la laine d'agneau.

Le reste de la soirée a été une succession de bouteilles de bières et d'ordres de clients qui veulent que je souris davantage. C'est seulement plus tard, après que la clientèle soit expulsée avec la chanson thème "The Closing Song" de Red Peter dont les paroles: sort d'ici, finit cette bière, et que les danseuses soient sorties des pièces pour se changer en polards, que j'ai réalisé que tout le monde était sur les gros nerfs.

"Qu'est-ce qu'il y a ?" j'ai demandé au bouncer barbu qui me reconduisait à mon auto poussiéreuse dont le siège arrière me servirait bientôt de chambre de motel.

"Le gars va en mourir," dit-il. Il s'avère que l'un des frères s'est fait ouvrir le crâne par un homme qui tenait un tuyau de fer. Il s'est fait aéroporté dans la ville voisine de Minot où il mourra quelques jours plus tard.

***

Je n'avais pas conduit pendant 2,000 milles de Brooklyn pour travailler comme serveuse dans un bar de danseuses. (Cela est arrivé quand j'ai manqué d'argent.) J'étais partie avec l'intention de faire un reportage sur le boom pétrolier qui transformait les villes dans les prairies du Dakota du Nord tout en désiquilibrant les forces mondiales et l'atmosphère de la terre.

Au printemps, la production du Dakota du Nord dépassait le million de barils de pétrole par jour. La source de cet or noir, comme on l'appelle là-bas, est le schiste du Bakken: une formation géologique à plusieurs couches, énergétiquement riche, qui s'étend sous le Dakota du Nord, un coin du Montana, jusqu'au Canada. On le considérait inaccessible jusqu'à ce que des développements en forage et la fracturation hydraulique ont rendu l'extraction du pétrole économiquement faisable. En 2008, le Geological Survey des É.-U. (USGS) annonçait que le schiste du Bakken contenait 25 fois plus de pétrole récupérable qu'on ne le pensait, ce qui a déclenché la plus grosse ruée pétrolière de l'histoire de cet état.

Maintenant, six ans plus tard, la région porte toutes les marques classiques contemporaines de l'enfer: des flammes toxiques 24h sur 24; de la fumée noire crachée par les camions-citernes; des explosions intermittentes causées pas l'éclair frappant les citernes pleines d'eaux usées rendues nécessaires à cause des fracturations hydrauliques; un Walmart immense; une abondance de meth, crack et boisson; des hivers glacials; des loyers plus dispendieux qu'à Manhattan; et beaucoup, beaucoup trop d'hommes. Pour les compagnies pétrolières, par exemple, le champ d'exploitation est Terre Sainte, l'un des seuls de l'histoire à dépasser le million de barils par jour, se méritant une "place dans le petit panthéon des vrais champs pétroliers," comme disait un analyste du marché de Reuters.

Cet été, propulsé partiellement par le boom du Dakota du Nord, les États-Unis ont dépassé la production totale de pétrole et de gaz de l'Arabie Saoudite, transformant non seulement cette nation le plus important consommateur de combustibles fossiles mais aussi le plus important producteur. (La Chine mène en ce moment quand il s'agit d'émissions annuelles de carbone, bien que ce pays ait plus d'émissions par habitant.) À peu près en même temps, le Pentagone a émis un avertissement que les changements climatiques, causés par une extraction incontrôlée de combustibles fossiles, "aggravera les stress outre-mer comme la pauvreté, la dégradation environnementale, l'instabilité politique, et les tensions sociales, des conditions qui favorisent les activités de terroristes et d'autres formes de violence." Un rapport subséquent émis par le comité conseil CNA Corporation Military Advisory Board, un organisme de recherche militaire financé par le gouvernement, ajoutait en plus que les effets des changements climatiques, l'insécurité alimentaire et les déplacements obligés de masse, pour n'en nommer que deux, "serviront de catalyseurs pour l'instabilité et les conflits."

Alors, quand je suis arrivée à Williston cet été, navigant mon véhicule entre les torchères et une affiche d’accueil affirmant "Boomtown USA!", j'anticipais faire un reportage sur certains des aspects les moins couverts du réveil de l'énergie domestique, comme la pollution des terres agricoles et la militarisation grandissante de l'industrie. Mais je suis aussi venue à Williston seulement pour être, pour explorer la question existentielle de la vie parmi une frénésie d'activités qui, les scientifiques nous ont assurés, menaceront probablement l'existence même de l'humanité telle qu'on la connaît depuis les dernières quelques milliers d'années.

***

Durant ma première nuit en ville, j'ai abouti dans une cabane en bois non fini d'un teneur de bar local et son ami, un homme immense de 230 livres qui travaille sur un site pétrolier et qui me rappelait de Fred Flintstone. Pendant que nous préparions des côtelettes de porc dans une coupe Campbell aux champignons tout en sirotant du Southern Confort aux cerises, les deux s'échangeaient des histoires de Williston, le genre d'histoires qui n'étaient pas publiées dans les journaux, disaient-ils.

Une fois, un homme menaçait de tuer le teneur du bar, et les policiers sont arrivés, et l'ont laissé partir, en disant: "Bien, il conduit un camion de la compagnie...". Bien des compagnies ici fournissent un camion à leurs employés, le plus souvent des pick-ups blancs Ford Super Duty avec le logo de "Halliburton" sur la porte du passager.

Ils ont recyclés les rumeurs sur les batailles secrètes dans des pièces isolés avec des murs isolés et des portes capitonnées, où le gagnant peut remporter de $50,000 à $60,000 en argent contant, et des parties de poker avec des mises de plus de $1,000. J'ai vite commencé à apprendre le défi de faire des reportages dans les champs d'exploitation pétroliers: les rumeurs ne manquent pas: par exemple, il n'y a pas une cachette d'armes et d'explosifs dans un bunker derrière le magasin Scenic Sports and Liquor, malgré tout ce qu'on en dit; pourtant, les choses les plus improbables se sont vraiment réalisées.

Pour ne mentionner que 3 d’entre elles qui se sont avérées très vraies: Pendant l'hiver, un résident de longue date a loué une cabane à glace pour $5 la nuitée à des travailleurs nouvellement arrivés qui se cherchaient une place; des membres d'une compagnie de sécurité privée appelée Black Hawk (sans liens avec la firme de mercenaires anciennement connue sous le nom de Blackwater, bien que le fondateur profite du "facteur intimidant" venant avec l'imbroglio) a déjà envoyé ses hommes armés avec des M-4 pour garder 30,000 livres d'explosifs destinés à faire des fracturations hydrauliques en plein milieu des badlands; des compagnies pétrolières ici ont brûlé à l'air libre du gaz naturel d'une valeur de milliards de dollars parce que c'était moins de trouble que de construire des gazoducs pour le transporter.

Que les histoires racontées par ces deux hommes ce soir-là étaient vraies, peu importe: j'étais surprise par leur générosité et la gentillesse des autres. Durant seulement cette première journée, une femme qui travaillait à la réception du Aspen Lodge & Suites m'a même prêté une chemise, suggéré des idées pour mon reportage, et m'a servi un repas cuisiné maison. Peut-être que les liens sociaux bien ancrés et l'humilité innée du Dakota du Nord avant le boom continue de s'imprégner dans la culture pétrolière, comme l'a suggéré un résident de longue date. Mais aussi, parfois la générosité peut s'imprégner dans d'autres choses entièrement différentes. Ce serveur de bar, par exemple, essayera de m'attirer dans l'industrie du sexe clandestin en me promettant que j'y aurais accès sans obligation d'y participer à cause que j'étais journaliste. Je n'avais qu'un seul test à passer qui m'obligeait à le faire sur mes genoux.

J'aurais aimé que tu le passes pour que je puisse t'aider dans ton reportage... m'a-t-il texté après que je suis partie de là.

***

La fois suivante que j'ai vu Fred Flintstone, il était fatigué de son horaire bizarre avec Key Energy, une compagnie fournisseur des pétrolières, alors nous avons passé l'après-midi à se promener dans son Ford Mercury à visiter les bureaux de ses compétiteurs parce qu'il se cherchait un nouvel emploi. Il portait des shorts bleu pâle et sa lèvre inférieure portait une ligne de points de suture, les restes d'une bataille récente dans un bar. Il est un amant, pas un batailleur, m'assure-t-il, bien qu'il a aussi ajouté que l'autre gars avait la mâchoire cassée et quelques sutures au crâne.

Selon les résidents et les travailleurs pétroliers, incluant Fred, il y a seulement deux choses à faire dans Williston: travailler et boire. Les raisons sont bien simple. Contrairement à d'autres parties du pays, les jobs bien payantes sont faciles à trouver dans les champs d'exploitation pétroliers. Ce qui fait que le Dakota du Nord peut se vanter d'avoir le plus faible taux de chômage de la nation, seulement 2,8%. Pour avoir ces emplois, toutefois, la majorité des travailleurs ont dû quitter leurs familles et déménager dans cette région reculée, ou ils se sont souvent retrouvés dans des logis fournis par la compagnie dans des conteneurs en acier, et où le nombre d'hommes, parfois dangereusement, dépasse celui des femmes. Plusieurs de ces hommes, par contre, ressentent de la solitude et de l'aliénation, ce qui les poussent à boire.

Fred était si certain qu'il se trouverait un nouvel employeur avant la fin de la semaine qu'il a mis un terme à sa recherche pour une job quand une chance s'est présentée pour se présenter à une femme. (Je sais que cela semble insensé,"il demanda à la secrétaire de Nabors, un sous-contractant des foreurs, "mais êtes-vous mariée? Non? Alors, à quelle heure finissez-vous de travailler?") Pas longtemps après, nous avons arrêté chez le restaurant R. Rooster BBQ Co. pour manger du porc effiloché, ensuite allé voir un Honda Accord 1998. Il me jura qu'il avait déjà acheté puis revendu 68 autos. Pour finir la journée, pour une raison que je n'ai jamais compris, nous sommes arrêté pour visiter un étal de boucherie.

À ma grande surprise, en route, il m'a expliqué qu'il n'était pas très d'accord avec toute cette chose d'extraction de pétrole; il a passé beaucoup de temps à regarder le canal de National Geographic à la télé et était préoccupé par la déforestation de la forêt amazonienne et les changements climatiques. "Quand ils disent que les ours polaires pourraient être disparus d'ici quelques années, c'est évident qu'on fait quelque chose de très, très mal."

Il n'était pas le premier travailleur pétrolier que j'ai rencontré qui se posait des questions sur son travail et manifestait des préoccupations sur les changements climatiques. Plusieurs s'avéraient très au courant que les torchères pour brûler le gaz naturel qui sortaient des puits forés contribuaient aux changements climatiques ou comment les eaux usées générées par les fracturations hydrauliques renversées peuvent stériliser les terres. J'ai même rencontré un ancien guide de rivière maintenant travailleur pétrolier qui m'a envoyé un poème complet de Terry Tempest Williams lors de mon départ.

Malgré de telles préoccupations bien réelles, la plupart étaient d'accord avec l'affirmation de Fred: "Moi, un seul homme tout seul... je ne peux rien y faire. Alors je vais juste m'enrichir puis ensuite déménager bien loin, me trouver une terre en Iowa ou au Nebraska, ou au Kansas, qu'importe, et vivrait ma vie en conséquence."

Quand je l'ai rencontré une semaine plus tard dans le centre récréatif récemment ouvert de Williston d'une valeur de $70,000, il s'était trouvé autre chose, bien sûr.

Bien sûr, il y a quelques endroits aux É.-U. où les résidents soulèvent une résistance sérieuse à l'extraction des combustibles fossiles. Pour en nommer quelques-uns: à P.R. Springs au Utah, les protecteurs des terres tentent d'arrêter la construction de la première mine commerciale de sables bitumineux de la nation; sur une réserve sur le plateau Black Mesa en Arizona, les Diné (souvent appelés Navajo, le nom que leur avaient donné les conquistadors espagnols) se battent pour fermer définitivement une mine de charbon; au Nebraska, des chefs Autochtones et des ranchers locaux se sont unis pour tenter de bloquer la dernière partie de l'oléoduc Keystone XL destiné à transporter la production sale des sables bitumineux de l'Alberta, au Canada, vers la côte du Golfe aux É.-U.. Mais Williston n'est pas l'un de ces endroits.

***

C'est difficile de savoir si Williston, avec toute sa prouesse technologique pour extraire les combustibles fossiles de la terre, est une fenêtre qui laisse entrevoir l'avenir de la nation, ou un dernier soupir de son passé. Ce qui est sûr, les opinions très divergentes sur ce boom pétrolier donne une idée de la polarisation croissante dans ce pays sur ce que les années à venir devraient nous réserver. D'un côté, les promoteurs du boom y voient une renaissance énergétique domestique, exactement ce que l'Amérique a besoin: plus d'endroits où n'importe qui veut avoir un emploi peut travailler, où la supériorité technologie règne et où les richesses (peut importe qui les possèdent) sont là pour ceux qui veulent bien les saisir, surtout si vous êtes un homme, ou un blanc, ou les deux. De l'autre côté, les opposants à la folie pétrolière considèrent qu'elle est la dernière incarnation cracheuse de feu des pires traditions de l'Amérique: une cupidité sans bornes, un pilleur de ressources, et un machisme violent. Ce dernier devient un problème croissant car les travailleurs qui ne sont pas de la place se réfugient dans les réserves locales des Three Affiliated Tribes, où ils sont à l'abri des poursuites par les gouvernements des tribus. Comme l'un d'eux s'est confié, "Vous pouvez faire n'importe quoi sauf tuer quelqu'un."

À Williston, une seule expression résume bien les deux côtés de la médaille: la plupart des travailleurs ici appellent cet endroit le "Wild West".

Juste sous ce sentiment de vertige et de promesse dans cette nouvelle frontière du nouvel empire énergétique de l'Amérique se cache une solitude indescriptible. Depuis le début du boom, au moins 15,000 travailleurs, la plupart des hommes, sont venus à Williston. Quand vous les rencontrez, c'est clair que la plupart traînent avec eux des résidus de demi-vies d'ailleurs: des photos de leurs enfants, des souvenirs de leurs anciennes épouses, des accents de langages parlés au Minnesota ou en Libye. "Vous pouvez presque voir ce qu'ils ont perdu, l'air désespéré dans leur visage," me dira Marc Laurent. Il est le gérant du Aspen Lodge & Suites où j'ai resté au début, avant que le prix dépasse mes moyens, et comme la plupart des nouveaux arrivants à Williston, à un moment donné, je me suis résignée à vivre dans mon auto.

Buck était l'un des invités de Laurent et exactement le genre d'homme qu'il m'a décrit. Un constructeur de charpentes de maisons, je l'ai rencontré la première fois à déambuler autour du Aspen avec un air du lendemain de la veille. Il avait déjà eu une épouse "là-bas, chez lui", mais cela n'a pas fonctionné.

On se connaissait à peine quelques minutes quand il m'a invité à diner, et ensuite être son colocataire. Juste pour sauver de l'argent, précise-t-il. (Je n'ai pas accepté.) Nous avons jasé sur le trottoir en bois non terminé qui devait connecter une série de chambres de motel qui sont arrivées pré-assemblées par camion à peine 6 mois auparavant. Il m'explique qu'il est ici depuis 8 mois, la plupart du temps à ériger l'ossature de maisons unifamiliales que les compagnies faisaient construire le plus rapidement que possible.

Un homme joufflu aux épaules pendantes, Buck disait: "J'essaye seulement de me reconstruire." Ses mots me faisaient penser à une image de lui qui tentait de se refaire une ossature, mesurant la longueur de ses bras, l'angle de son épaule, jusqu'à ce que finalement, il se cloue bien droit comme il se doit. Il y avait quelque chose de désespéré dans la façon dont lui et les autres comme lui sont venus ici. Il y en avait tellement, après tout, qui sont venus dans cette ville parce qu'ils avaient besoin de travail, parce que l'économie locale s'était effondrée en 2008 et n'était jamais vraiment revenue. Par contre, ils n'étaient pas disposés à se couler des bases solides à Williston. Plutôt, comme plusieurs m'ont affirmé avec force, après quelques années, après avoir fait leur argent, ils partiraient.

Un sentiment de déracinement s'encra en moi pendant que les semaines s'étiraient à ne plus en finir. Parfois, ce que j'apprenais me laissais étourdie, comme les évaluations assumées que j'ai entendues que le boom Bakken durerait facilement un autre 20 ans. Ou que les compagnies énergétiques étaient à développer en ce moment des plans pour faire de la fracturation hydraulique à grande profondeur sous l'eau dans le Golfe du Mexique. Ou que le comté de Tulare, en Californie, n'avait plus d'eau potable pendant cette sécheresse qui n'en finissait plus. Mais la plupart du temps, je me sentais engourdie. Quand l'un des bras fort de la place de danseuses où je travaillais me dit plus tard que la tête du garçon mort s'était ouverte "comme un cantaloup," je me suis surprise à ne pas sentir grand chose parce qu'il ne m'avait pas laissé un pourboire.

"Je pense à rester au Dakota du Nord pendant un bout de temps," j'ai dit au répondeur de mon meilleur ami avant de faire mon quart de travail comme serveuse, environ un mois après avoir commencé mon voyage. Je faisais de la bonne argent chez Whispers. J'ai fait aussi au moins quelques bons amis que je savais n'étaient pas des proxénètes, et je commençais à m'habituer à vivre dans mon auto. Je parlais de moins en moins souvent à mes parents et mes souvenirs de la côte est semblaient s'effacer. Il semblerait que je commençais à faire parti du pays du pétrole, et il commençait à faire parti de moi.

Mon amie, par contre, n'était pas impressionnée. "Non, ne fait pas çà," me dit-il au téléphone le lendemain. "C'est le temps de revenir à la maison."

Alors, environ une semaine plus tard, j'ai rempli mon coffre à gant avec mes cahiers de notes et pris le chemin vers l'est, laissant derrière les torchères oranges dans la nuit noire, les raffineries de métal tordu de l'Indiana et l'Ohio, les têtes de puits fracturés parsemant les champs de la Pennsylvanie, consommant de l'essence tout le long, les souvenirs de Williston toujours bien présents dans ma tête.

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Money, death, and danger in North Dakota’s fracking capital

By Laura Gottesdiener

Cross-posted from Tom Dispatch
14 Oct 2014 7:09 AM


At 9 p.m. on that August night, when I arrived for my first shift as a cocktail waitress at Whispers, one of the two strip clubs in downtown Williston, I didn’t expect a 25-year-old man to get beaten to death outside the joint. Then again, I didn’t really expect most of the things I encountered reporting on the oil boom in western North Dakota this past summer.

“Can you cover the floor?” the other waitress yelled around 11 p.m. as she and her crop-top sweater sidled behind the bar to take over for the bouncers and bartenders. They had rushed outside to deal with a commotion. I resolved to shuttle Miller Lites and Fireball shots with extra vigor. I didn’t know who was fighting, but assumed it involved my least favorite customers of the night: two young brothers who had been jumping up and down in front of the stage, their hands cupping their crotches the way white boys, whose role models are Eminem, often do when they drink too much. One sported a buzz cut, the other had hair like soft lamb’s wool.

The rest of the night was a blur of beer bottles and customer commands to smile more. It was only later, after the clientele was herded out to Red Peters’ catchy “The Closing Song” — “get the fuck out of here, finish up that beer” — and the dancers had emerged from the dressing room in sweatshirts, that I realized everyone was on edge.

“What’s wrong?” I asked the scraggly bearded bouncer walking me to my dusty sedan, whose backseat would soon double as my motel room.

“The kid’s going to die,” he replied. Turned out one of the brothers had gotten his head bashed in by a man wielding a metal pipe. He’d been airlifted to the nearby city of Minot where he would pass away a few days later.

***

I hadn’t driven nearly 2,000 miles from Brooklyn to work as a cocktail waitress in a strip club. (That only happened after I ran out of money.) I had set off with the intention of reporting on the domestic oil boom that was reshaping North Dakota’s prairie towns as well as the balance of both global power and the earth’s atmosphere.

This spring, production in North Dakota surged past one million barrels of oil a day. The source of this liquid gold, as it is locally known, is the Bakken Shale: a layered, energy-rich rock formation that stretches across western North Dakota, the corner of Montana, and into Canada. It had been considered inaccessible until breakthroughs in drilling and hydraulic fracturing made the extraction of oil from it economically feasible. In 2008, the United States Geological Survey (USGS) announced that the Bakken Shale contained 25 times more recoverable oil than previously thought, sparking the biggest oil rush in state history.

Now, six years later, the region displays all the classic contemporary markers of hell: toxic flames that burn around the clock; ink-black smoke billowing from 18-wheelers; intermittent explosions caused by lightning striking the super-conductive wastewater tanks that hydraulic fracturing makes a necessity; a massive Walmart; an abundance of meth, crack, and liquor; freezing winters; rents higher than Manhattan; and far, far too many men. To oil companies, however, the field is hallowed ground, one of the few in history to break the million-barrel-a-day benchmark, earning it “a place in the small pantheon of truly elite oil fields,” as one Reuters market analyst wrote.

This summer, driven partially by North Dakota’s boom, the United States surpassed Saudi Arabia in total oil and gas production, making the nation not only the number one consumer of fossil fuels but also the number one producer. (China is currently leading when it comes to annual carbon emissions, although this country still has higher emissions per capita.) Around the same time, the Pentagon issued a warning that climate change, caused by unchecked fossil-fuel extraction, “will aggravate stressors abroad such as poverty, environmental degradation, political instability, and social tensions — conditions that can enable terrorist activity and other forms of violence.” A subsequent report issued by the CNA Corporation Military Advisory Board, a government-funded military research organization, went even further, stating that the effects of climate change — food insecurity and massive forced displacement, just to name two — “will serve as catalysts for instability and conflict.”

And so, when I arrived in Williston this summer, easing my sedan past the fiery flare offs and the welcome sign exclaiming “Boomtown U.S.A.!,” my plan was to report on some of the less discussed aspects of the domestic energy revival, such as farmland pollution and the oil industry’s increasing militarization. But I had also come to Williston just to be, to explore the existential question of what it’s like to live amid a frenzy of activities that, as scientists have assured us, are likely to threaten the very existence humanity has known for the last few thousand years.

***

On my first night in town, I landed in the unfinished, wood-walled cabin of a local bartender and his friend, a flat-faced, 230-pound hulk of a man who worked on an oil rig and reminded me of Fred Flintstone. As we prepared pork chops stewed in Campbell’s mushroom soup and sipped cherry-flavored Southern Comfort, the two traded stories about Williston — the kind, they said, that don’t make the newspapers.

There was the time a man threatened to kill the bartender, and when the cops arrived, they let him go, arguing, “Well, he’s driving a company truck … .” Plenty of companies here issue their employees trucks, although by far the most common branded vehicles in Williston are white Ford Super Duty pick-ups with “Halliburton” stenciled on the front passenger door.

They recycled rumors about secret fights in rooms with padded walls and padded doors, where a winner can walk away with $50,000 to $60,000 in cash, and home poker games with buy-ins of more than $1,000. I quickly began learning the challenge of reporting from the oilfields: Rumors are rampant — there is not, for example, a cache of weapons and explosives stashed in a bunker behind Scenic Sports and Liquor, despite claims that it’s so — yet the most insane-sounding things have actually happened.

To mention just three that turned out to be all too true: During the winter, a long-time resident rented out an ice house for $5 a night to newly arrived workers struggling to find lodging; members of the Black Hawk private security company (no relation to the mercenary firm formerly known as Blackwater, although the founder enjoys the “intimidation factor” caused by the confusion) once set its men, armed with M-4 assault rifles, to guard 30,000 pounds of fracking-related explosives in the middle of the badlands; oil companies here have burned billions of dollars worth of natural gas straight into the atmosphere because it was less hassle than building pipelines to transport it.

Whether or not any of the stories those two men told that night were accurate, I was struck by their generosity and the kindness of others. That first day alone, I’d been lent a shirt by a woman working at the front desk of the Aspen Lodge & Suites, offered ideas for stories, and fed a home-cooked meal. Perhaps the deep social ties and steadfast humility of pre-boom North Dakota continued to permeate oilfield culture, as one lifelong resident optimistically suggested. Then again, sometimes generosity can shade over into other things entirely. That bartender, for example, would later try to lure me into the underground sex industry by promising no-participation-required journalistic access. I only had to pass one test, which involved being on my knees.

I wish you could have followed through so i could of helped your story … he texted me after I walked out.

***

The next time I saw Fred Flintstone, he was tired of his haphazard schedule with Key Energy, an oilfield service company, so we spent the afternoon cruising in his Ford Mercury, visiting the offices of its competitors as he looked for a new job. He wore baby blue surfboard shorts and his lower lip was embroidered with a line of black stitches from a recent bar brawl. He was a lover, not a fighter, he assured me, although he also mentioned that the other guy had a broken jaw and a few staples in his head.

According to residents and oilfield workers, including Fred, there are only two things to do in Williston: work and drink. The reasons are simple enough. Unlike in significant parts of the country, well-paying jobs are easy to acquire in the oil fields. As a result, North Dakota boasts the lowest unemployment rate in the nation, an eye-popping 2.8 percent. To access these jobs, however, the majority of workers had to leave their families and relocate to this remote region, where you often end up living in company-provided housing in steel shipping containers and the number of men vastly, sometimes dangerously, exceeds that of women. Many of these men, in turn, experience feelings of loneliness and alienation, which is where the drinking comes in.

Fred was so confident he’d have a new employer by the end of the week that he suspended the day’s job-hunting when the remotest possibility of picking up a woman arose. (“I know this is crazy,” he asked the secretary at Nabors, a drilling contractor, “but are you all married up? No? Well, when do you get off?”) Soon enough, we parked at R. Rooster BBQ Co. to down some pulled pork, then stopped to check out a ’98 Honda Accord. He swore that he’s bought and sold 68 cars over the years. To end our day, for reasons that passed me by, we stopped and checked out a butcher’s shop.

To my surprise, as we drove, he explained that he wasn’t a big fan of the whole oil extraction thing; he’d spent much time watching the National Geographic Channel and was concerned about the deforestation of the rainforest and the warming of the atmosphere. “When they say polar bears could be extinct in the next few years, you’re obviously doing something very, very wrong.”

He wasn’t the first oilfield worker I’d met who wondered just what he was involved in and exhibited concern about climate change. Many proved surprisingly aware of the way that flaring off the natural gas that surges out of the drilled wells contributes to global warming or how spilled wastewater from the hydro-fracking process can sterilize land. I’d even met one former river guide turned oilfield worker who texted me an entire Terry Tempest Williams poem upon my departure.

Despite such genuine concerns, most agreed with Fred’s assessment: “I, one man alone … I can’t do a fucking thing about it. So I’ll just get rich and I’ll move away, find my acreage back in Iowa or Nebraska or Kansas or whatever, and live my life accordingly.”

When I ran into him again about a week later at Williston’s recently opened $70 million recreation center, sure enough, he had a new gig.

Of course, there are a slew of sites in the United States where residents are mounting serious resistance to fossil fuel extraction. To name just three: in P.R. Springs, Utah, land defenders are attempting to stop the construction of the nation’s first commercial tar sands mine; on a reservation on the Black Mesa plateau in Arizona, the Diné (often called Navajo, the name imposed by Spanish conquistadors) are fighting to permanently shut down a coal mine; in Nebraska, indigenous leaders and local ranchers have joined forces to try to block the final leg of the Keystone XL pipeline slated to bring carbon-dirty tar sands from Alberta, Canada, to the U.S. Gulf Coast. But Williston is not one of those places.

***

It’s hard to know whether Williston, for all its technological prowess in extracting fossil fuels from the earth, is a window into the nation’s future — or a last gasp from its past. Certainly, the sharply divergent opinions of what to make of the oil boom catch something of the country’s increasing polarization over what the coming years ought to hold. On one side, supporters of the boom see a domestic energy revival as exactly what America needs: more places where anyone who wants a job can work, where technological superiority carries the day, and where riches (never mind whose) are there for the taking — especially if you are a man, or white, or both. On the other side, opponents of the oil frenzy consider it the latest methane-gas-flaring incarnation of the worst American traditions: unbridled greed, resource plunder, and violent machismo. The latter is becoming an increasing problem as non-native oilfield workers flock to the local reservations of the Three Affiliated Tribes, where they are immune from prosecution by tribal governments. As one told the Atlantic, “You can do anything short of killing somebody.”

In Williston, a single term catches both views: Workers here overwhelming call this place “the Wild West.”

Just beneath the sense of giddiness and possibility in this frontier outpost of America’s new energy empire lurks loneliness of an almost indescribable sort. Since the boom began, at least 15,000 workers — mostly men — have descended on Williston alone. When you meet them, it’s clear that most carry the residue of half-lives from someplace else: photographs of their children, memories of ex-wives, accents bred in Minnesota or Liberia. “You can almost see the lost-ness, the desperation in their faces,” Marc Laurent told me. He’s the manager of the Aspen Lodge & Suites where I first stayed, before the cost of housing got the best of me and, like almost all newcomers to Williston at one point or another, I resigned myself to living in my car.

Buck was one of Laurent’s guests and exactly the type of man he was describing. A house framer, I first met him wandering around the Aspen’s dirt courtyard looking hangover-haggard. He had once had a wife — “back home” — but it didn’t work out.

Within minutes of meeting, he invited me out to lunch — and then to be his roommate. Just to save money, he clarified. (I declined the offer.) We spoke on the unfurnished wooden walkway that connected a series of row-house motel rooms that had arrived pre-assembled on a tractor-trailer less than six months before. He explained that he’d been here about eight months, mostly framing the single-family houses that companies were putting up as fast as possible.

A jowly man of sagging posture, Buck said, “I’m just trying to rebuild myself.” His words conjured up for me an image of him attempting to frame himself, measuring the length of his arms, the angle of his shoulders until, finally, he hammered himself back into shape. There was something desperate about the way he and others like him had come here. So many, after all, flocked to this town because they needed the work, because their local economies had collapsed in 2008 and had never really come back. They weren’t, however, looking to pour themselves a new foundation in Williston. Instead, as so many reassured me, after a few years, after the money was made, they would leave.

A sense of rootlessness gripped me as the weeks stretched on. Sometimes what I was learning left me feeling dizzy — like the commonplace estimates I heard that the Bakken boom could easily last another 20 years. Or that energy companies were now developing plans for deepwater fracking in the Gulf of Mexico. Or that the county of Tulare, Calif., had run out of tap water in that state’s never-ending mega-drought. But most of time I just felt numb. When one of the bouncers at the strip joint where I worked later told me that the dead boy’s head had cracked open “like a cantaloupe,” I found myself not caring all that much because he hadn’t left me a tip.

“I’ve been thinking maybe I’ll just stay in North Dakota for a while,” I told my best friend’s answering machine before walking into a waitressing shift about a month into my trip. I was making good money at Whispers. I had made at least a few friends who I knew were not pimps, and I’d gotten the hang of living out of my car. I spoke to my parents less and less frequently and my memories of the East Coast seemed to be fading. I had, it seemed, become part of oil country — and it was becoming part of me.

My friend, however, was not impressed. “No, don’t do that,” he said on the phone the next day. “You need to come home.”

So, about a week later, I stuffed my glove compartment with my Staples spiral notebooks and headed east, past orange flares licking the black night, past the tangled-metal refineries of Indiana and Ohio, past fracking-well pumps pecking at the fields of Pennsylvania, burning gasoline the whole way, the memory of Williston never quite receding.


Link: http://grist.org/business-technology/money-death-and-danger-in-north-dakotas-fracking-capital/

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