Friends of the Richelieu. A river. A passion.



"Tout cedit pays est fort uny, remply de forests, vignes & noyers. Aucuns Chrestiens n'estoient encores parvenus jusques en cedit lieu, que nous, qui eusmes assez de peine à monter le riviere à la rame. " Samuel de Champlain


"All this region is very level and full of forests, vines and butternut trees. No Christian has ever visited this land and we had all the misery of the world trying to paddle the river upstream." Samuel de Champlain

Thursday, April 25, 2013

La 3e lettre de Sandra écrite en prison

Photo: © Benjamin Gervais / The PPC

Ma traduction libre du 3e message écrit par Sandra de sa cellule de prison, adressé tout spécialement aux personnes qui survivent de leur cancer.
Mardi, le 23 avril 2013.

Comme tout le monde le sait, se faire mettre en prison implique tout un rituel: des photos, une prise d'empreintes digitales. Ce que vous ne savez peut-être pas, c'est que se faire prendre ses empreintes digitales, ce n'est plus avec de l'encre et du papier. Comme tout le reste, dont les photos, c'est maintenant tout numérisé. L'officier qui vous reçoit vous frotte d'abord les doigts avec une série de tissus imbibés pour ensuite aplatir votre main sur une vitre de scanner. Voilà! Ils sont maintenant agrandis plusieurs fois: des copies de vos empreintes qui flottent virtuellement dans un ordi. Une suite de données électroniques qui assurent que cette information y est pour toujours. Un seul signal sonore veut dire qu'on doit refaire le rituel, incluant le nettoyage du bouts des doigts avec les serviettes humides.

Entre-temps, vous êtes fascinés par vos doigts sur l'écran, en noir et blanc, qui vous interpellent derrière l'écran, leur contour, les spirales, les vallées et les chaînes de montagnes, tous familiers et étranges à la fois. Et çà vous frappe tout à coup: comme c'est se regarder les seins sur une mammographie! Seulement, cette fois-ci, vous connaissez déjà la durée de votre séjour: c'est beaucoup plus court que de souffrir d'un cancer, et il n'est pas question d'en mourir.

Voici une autre différence: quand l'officier doit reprendre l'image, il lance un juron, tandis que le technicien de radiologie, qui n'est pas beaucoup plus gentil qu'un agent de la paix de Chemung County, dit quelque chose comme: "Le docteur veut une autre prise. Penchez-vous vers l'avant. Prenez votre souffle et gardez-le." Çà rassure moins que le juron.

Je suis emprisonnée dans la prison de Chemung County pour avoir violé la propriété privée d'un site de station de compression sur les rives de Seneca Lake, où la plus importante compagnie de stockage et de transport énergétique de la nation projette de stocker des produits vaporeux de la fracturation hydraulique - du méthane, du butan, du propane - dans dans mines de sel abandonnées sous le lac. Si Inergy obtient son feu vert, mon chez-moi paisible dans les Finger Lakes sera transformé en centrale de stockage et de transport de gaz fracturés de l'entière région nord-est des É.-U. Pour mon acte de désobéissance civile, dont bloquer l'accès à ce site avec 11 autres résidents, j'ai écopé d'une sentence de 15 jours de prison.

Ayant grandi dans une région très industrialisée, sous le vent des plus grands pollueurs de la vallée de la rivière Illinois, et diagnostiquée avec le cancer de la vessie à l'âge de 20 ans, et ayant documenté, dans la trentaine, la présence de solvants et d'autres cancérigènes dans les puits d'eau potable de ma municipalité, et mère dans la quarantaine, j'estime bien précieux l'air et l'eau propres, et je suis motivée pour les protéger. Je crois que beaucoup de cancéreux en rémission pensent comme moi. Ce que je ne m'attendais pas, étant une citoyenne qui a fait de la désobéissance civile pour la première fois, c'est comment j'étais bien préparée à faire de la prison à cause de ce que j'ai vécu comme personne ayant eu un cancer. D'après ce que je peux voir, si vous avez passé du temps dans un hôpital, attaché à un tube cathéter, vous avez tout ce qui vous faut pour faire face à une période passée en prison.

Hôpital: mauvaise nourriture, lumières allumées toute la nuit, des fouilles corporelles, des gens que vous ne connaissez pas contrôlent votre vie, limité dans un petit espace restreint, peu d'accès à la lumière du jour, réponse tardive à un appel du bouton pour l'infirmière, bruits irritants de télévision dans d'autres pièces, copeaux de glace.

Prison: même chose, sans bouton d'appel à l'aide.

Finalement, si vous pouvez souffrir d'un cancer, vous pouvez être un prisonnier. Avez-vous jamais marché le long d'un corridor d'hôpital en tenant une perche de perfusion intraveineuse d'une main tout en tentant de garder fermer votre chemisette d'hôpital de l'autre? Si oui, vous n'aurez pas de peine à vous débrouiller avec des chaînes aux chevilles et le costume de la prison. Vous êtes-vous jamais étendu seul sur une table d'examen avec les pieds dans les étriers, préparées et recouvert d'un drap, à attendre éternellement pour que le médecin ait terminé avec son autre patient et vienne enfin vous voir? Si oui, vous saurez comment vous divertir l'esprit pendant que vous êtes menotté au mur à attendre que le gardien s'occupe du prisonnier dans la chambre d'à côté.

Je vous dis tout ceci parce qu'il y a grand besoin, à ce moment historique, que le citoyen en général et la personne souffrant d'un cancer en particulier de s'insérer dans le processus politique. Je ne vous demande pas d'agir illégalement. La désobéissance civile est une décision à prendre très personnelle, et pour moi, c'est devenu un acte individuel selon ma conscience, mais je vous affirme qu'il y a plus raison d'avoir peur de notre inaction que des conséquences de nos actions.

Après 2 décennies de recherche, d'écritures, de conférences, et avoir présenté des témoignages d'expert en tant que biologiste sur le rôle des produits chimiques cancérigènes, des perturbateurs endocriniens et les toxiques pour le développement, pour tenter de promouvoir une réforme de produits chimiques toxiques, je dois admettre que très peu a changé. Maintenant, je suis témoin d'un essor de la fracturation hydraulique, qui utilise et relâche des produits chimiques cancérigènes, des perturbateurs endocriniens, et des produits toxiques pour le développement, un procédé qui profite d'exemptions de la plupart de nos lois environnementales fédérales, tout cela défait le peu de progrès que nous avons accompli et nous précipite vers la catastrophe des changements climatiques.

Voici ce dont je suis maintenant convaincue: les industries pétrolières, gazières et du charbon, et tout les hydrocarbures cancérigènes qu'ils produisent et génèrent, ne seront pas démantelées par uniquement de bonnes données.

Et ici, de ma cellule dans l'aile D, sont mes observations les plus récentes: ayant été mise sous arrestation 3 jours avant un examen de suivi pour le cancer, celui-ci étant très familier, fait quand même plus peur que mon arrestation. Les images de mes prises d'empreintes digitales de 2013 étaient beaucoup moins terrifiantes que les images prises de ma colonoscopie de 1995. Et rester étendue sans bouger pendant 45 minutes dans un tube de IRM est plus difficile à vivre que passer 5 jours enfermée 24 heures sur 24. Dans une cellule de prison, on peut reprendre contact avec la Bible, on peut faire des pushups, on peut réfléchir.

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

"Sandra Steingraber: Letter from Chemung County Jail, Part 3, A Message to Fellow Cancer Survivors

Tuesday, April 23, 2013

As everyone knows, being booked into jail involves rites of passage: mug shots and fingerprints. What you may not know is that being fingerprinted no longer involves ink and paper. Like everything else, including the mug shot, this ritual has been digitized. The booking officer first rubs your fingers with a sequence of baby wipes and then splays them onto the glass plate of a scanner. Voilà! There they are, many times larger than life: facsimiles of your fingertips floating in the computer monitor. A series of happy electronic chirps means the pictures are keepers; a single beep means re-do (and out come the baby wipes again).

Meanwhile, you stare transfixed at your own disembodied black-and-white fingers, hailing you from behind the screen – their contours, whorls, and ridges, all familiar and alien at the same moment. And then it hits you: how exactly like looking at one’s own breasts on a mammogram! Only this time: you already know the length of your sentence; it’s far shorter than having cancer, and it doesn’t involve the possibility of death.

Here’s another difference – when the booking officer has to retake the image, he actually says F*CK, whereas the radiology technician – whose level of loving kindness roughly approximates Chemung County’s deputies – says things like, “The doctor wants another shot. Lean forward. Take a breath and hold it.” Which is less reassuring than F*CK.

I’m incarcerated in the Chemung County Jail for trespassing at a compressor station site on the banks of Seneca Lake, where the nation’s largest energy storage and transportation corporation seeks to store the vaporous products of fracking – methane, butane, propane – in abandoned salt mines under the lake. If Inergy, LLC has its way, my tranquil Finger Lakes home will be turned into the fracked gas storage and transportation hub of the entire Northeast. For my act of civil disobedience, which involved blockading this site with eleven other residents, I received a 15-day sentence.

As someone who grew up amid heavy industry – downwind from the Illinois River Valley’s biggest polluters – who was diagnosed with bladder cancer at 20, who documented, in my 30s, the presence of solvents and other carcinogens in my hometown drinking-water wells, who became a mother in my 40s, I highly value clean air and water and am motivated to protect them. I think a lot of cancer survivors feel that way. What I didn’t expect – as a first-time civil disobedient – was how well prepared I was for jail by my prior experience as a cancer patient. As far as I can see, if you’ve ever spent time in a hospital, tethered to a catheter tube, you have all the skills you need to cope with incarceration.

Hospital: Bad food; lights on all night; strip searches; people you’ve never met control your life; confined to a small space; little access to daylight; delayed response to call-button request; annoying television in the background; ice chips.

Jail: Ditto, minus the call button.

Basically, if you can be a cancer patient, you can be an inmate. Have you ever walked down a hospital corridor pushing an IV stand with one hand while trying to hold shut your backless, blue gown with the other? If so, you will have no trouble with ankle chains and an orange jumpsuit. Have you ever laid alone on an examination table with your feet in the stirrups, prepped and draped, waiting endlessly for the doctor to finish up with the previous patient and walk through the damned door? If so, then you will know how to occupy your mind while handcuffed to a wall while the officer finishes booking the inmate in the next room.

I say all this because there is a great need, at this historical moment, for citizens in general and cancer patients in specific to vigorously insert themselves into the political process. I’m not calling you to unlawful behavior. Civil disobedience is a highly personal decision and, for me, came as an individual act of conscience – but I do contend that there is more to fear from our inaction than from the consequences of our actions.

After two decades of researching, writing, speaking, and submitting expert testimony as a biologist on the role of chemical carcinogens, endocrine disruptors, and developmental toxicants in an attempt to bring about toxic chemical reform, I have to admit that very little has changed. Now I am watching the fracking boom – which uses and releases chemical carcinogens, endocrine disruptors, and developmental toxicants and enjoys exemptions from most of our federal environmental laws – undo what little progress we have made and hurtle us further down the road toward the catastrophe of climate change.

Here is what I am now convinced of: the oil, gas, and coal industries – and all the hydrocarbon carcinogens they produce and release – will not be dismantled by good data alone.

And here, from cell block D, are my recent observations: having been arrested three days prior to a cancer checkup, the latter, while deeply familiar, was far more frightening than the former. The images from my 2013 fingerprinting were far less terrifying than those from my 1995 colonoscopy. And lying motionless for 45 minutes in an MRI tube is a bigger ordeal than five days in 24-hour lockup. In a jail cell, you can reacquaint yourself with the bible, you can do pushups, you can think."

Link: http://www.facebook.com/notes/raising-elijah-by-sandra-steingraber/sandra-steingraber-letter-from-chemung-county-jail-part-3-a-message-to-fellow-ca/573687715985048

No comments:

Post a Comment