Tuesday, November 18, 2014
Comment vendre un pipeline aux Québécois
Photo: Radio-Canada
TransCanada dispose d’un plan précis pour faire aboutir le projet Énergie Est
Publié dans Le Devoir du 18 novembre 2014 |Alexandre Shields
Si elle veut convaincre les Québécois d’appuyer son mégaprojet de pipeline Énergie Est, TransCanada doit vanter la sécurité de ce moyen de transport par rapport au train, dans la foulée de la tragédie de Lac-Mégantic. La pétrolière doit aussi établir des stratégies afin de nuire aux opposants tout en éduquant les citoyens d’ici sur les vertus du pétrole des sables bitumineux.
Ce sont là certains des principaux piliers du « plan stratégique » pour le Québec élaboré par la multinationale des relations publiques Edelman, à la demande de TransCanada. Le document, obtenu par Greenpeace et transmis au Devoir, présente plusieurs éléments clés de la stratégie qui devrait se déployer dans le but de convaincre les Québécois d’accepter le passage ici du plus important projet de transport de brut albertain en Amérique du Nord.
Revenant d’entrée de jeu sur le fait que le transport de pétrole est devenu un « enjeu majeur » pour les citoyens du Québec depuis la catastrophe de Lac-Mégantic, le rapport souligne que le « scepticisme » par rapport à l’utilisation du train « est très fort » depuis ces événements tragiques. Les Québécois, peut-on lire, souhaitent désormais être mieux « protégés », et « le pipeline pourrait constituer une réponse à cette préoccupation ». Les pipelines peuvent en fait constituer une « nouvelle opportunité » de transport pétrolier, même s’ils demeurent toujours « méconnus » du public.
Edelman, qui a aussi travaillé sur le projet de pipeline Keystone XL, propose justement d’éduquer les Québécois à ce sujet. « Les Québécois ne sont pas familiarisés avec le pétrole comme source d’énergie. Les mythes et les appréhensions sont encore plus présents lorsqu’il s’agit du pétrole provenant des sables bitumineux albertains, qui sont directement associés au gouvernement de Stephen Harper. L’éducation sur le sujet est donc fortement requise », peut-on lire dans le document de 45 pages rédigé en anglais.
Investir pour convaincre
Dans ce contexte éducatif mis en avant par la pétrolière, il serait toutefois préférable d’utiliser le bon langage. « Nous recommandons de continuer à miser sur le terme “ressources naturelles” lorsque cela est possible, plutôt que le terme “sables bitumineux”, qui est perçu négativement », écrit Edelman dans ce rapport daté du 20 mai 2014. Celui-ci fait partie d’une série de documents confidentiels obtenus par Greenpeace.
Puisque le projet de pipeline et de port d’exportation de Cacouna touche plusieurs communautés du Québec, la firme de relations publiques souligne l’importance de réaliser des investissements financiers afin de rallier la population à son projet. « Nous recommandons de définir un programme d’investissement communautaire spécifique au fleuve Saint-Laurent en raison de son importance dans le projet, en misant sur la restauration de quais et d’infrastructures riveraines puisque cela pourrait générer un retour sur l’investissement significatif. »
Edelman estime aussi que « soutenir une campagne majeure de financement d’une université québécoise tout en contribuant à ses efforts dans la recherche environnementale pourrait aider à démontrer le sérieux de TransCanada par rapport à ces enjeux, mais aussi contribuer à améliorer l’image de la compagnie ». Le Devoir révélait récemment que TransCanada négocie actuellement avec l’Institut des sciences de la mer de Rimouski le financement d’une chaire de recherche sur le Saint-Laurent axée sur l’étude du béluga.
En plus de ces engagements financiers, TransCanada devrait rencontrer et chercher à rallier à sa cause des personnalités influentes du Québec. La liste établie par Edelman comprend 19 noms, dont ceux de Brian Mulroney, Lucien Bouchard, Monique Jérôme-Forget, Pierre Marc Johnson, Denis Coderre, Régis Labeaume, le p.-d.g. d’Hydro-Québec, Thierry Vandal, ainsi que le président de la Caisse de dépôt et placement, Michael Sabia.
Contrer l’opposition
S’il importe de se doter d’alliés, Edelman insiste aussi sur la nécessité de contrer les opposants, qui sont d’ailleurs de plus en plus nombreux. « Si on les laisse faire, les opposants à Énergie Est utiliseront chaque information à leur disposition pour attaquer le projet et TransCanada. » La firme souligne notamment la nécessité d’établir le profil précis des groupes d’opposants.
« Dans le but d’ajouter des obstacles aux opposants, nous travaillerons avec des tierces parties et nous les armerons avec l’information dont ils ont besoin pour faire pression sur les opposants et les distraire de leur mission », fait aussi valoir la firme de relations publiques. Ces « tierces parties » pourraient être par exemple des voix « crédibles » recrutées au sein des communautés.
Parmi les arguments à mettre en avant, celui des bénéfices économiques semble être en haut de la liste. Edelman estime ainsi qu’à la suite des récentes élections, les Québécois ont tourné le dos à la question nationale et sont désormais plus préoccupés par les problèmes économiques. « Dans ce contexte, le projet Énergie Est pourrait être présenté comme une nouvelle occasion d’insuffler une nouvelle vie dans l’économie du Québec, grâce à la création d’emplois et d’effets indirects positifs sur d’autres secteurs. »
La firme recommande par exemple de mettre en avant l’argument des bénéfices économiques afin de mieux faire accepter la construction d’un port pétrolier en plein coeur de la pouponnière des bélugas du Saint-Laurent. « L’impact économique du projet sera un argument fort pour rallier la communauté [de Cacouna] au projet », affirment les auteurs de la stratégie préparée par Edelman.
Le projet doit permettre, à terme, de créer 133 emplois directs au Québec. Le pipeline Énergie Est doit faire passer ici 1,1 million de barils de pétrole brut chaque jour, soit l’équivalent de 1335 wagons-citernes. La province deviendra ainsi le point le plus stratégique au Canada pour l’exportation de pétrole des sables bitumineux.
Lien: http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/424197/comment-vendre-un-pipeline-aux-quebecois
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How to sell a pipeline to the Quebecois
TransCanada has a precise plan to realize its Energy East project
My translation of an article published in one of the last independent newspapers in Quebec.
If it wants to convince Quebecois to approve of its Energy East pipeline mega-project, TransCanada must boast about the security of this way of transportation compared to the train, especially after the Lac-Megantinc tragedy. The oil company must also elaborate strategies to harm the opponents while educating the local citizens on the virtues of the tar sands oil.
Those are the main points of the "strategic plan" for Quebec cooked up by the multi-national public relations company Edelman at TransCanada's request. The document, sent to Greenpeace and transmitted to Le Devoir, has many key elements of the strategy that should be deployed in order to convince Quebecois to accept in their province the most important transportation project of Albertan crude in North America.
Insisting ont the fact that the transportation of oil has become at stake for the citizens of Quebec since the Lac-Megantic disaster, the report mentions that the "scepticism" in regards of trains "is very strong" since that tragic event. Quebecois, it says, now wish to be better "protected", and "the pipeline could become the answer to this preoccupation". Pipelines could become a "new opportunity" for the transport of oil, even if they are still "unknown" by the public.
Edelman, who also worked on the Keystone XL pipeline project, proposes to educate Quebecois on the subject. "The people of Quebec are not familiar with oil as a source of energy. Myths and apprehension are even more real when Alberta tar sands oil is involved, because it is directly associated with the Stephen Harper government. Education on the subject is greatly necessary", reads the 45 page English document.
Invest to convince
In this education context adopted by the oil company, it would be preferable to use the right language. "We recommend to continue using the terms "natural resources" whenever possible, rather than the words "tar sands" witch has a negative connotation", writes Edelman in the report dated May 20 2014. It is part of a series of confidential documents received by Greenpeace.
Since the pipeline project and the exportation harbor in Cacouna impact many communities in Quebec, the public relations firm mentions the importance of financial investments to bring acceptance of its project within the population. "We recommend a definition of a specific community investment program for the St. Lawrence River because of its importance in the project, specifically in the restoration of docks and riverside infrastructures because that could generate a significant return on investments."
Edelman also estimates that "backing up an important financing campaign of a Quebec university while contributing to its efforts in environmental research could help demonstrate who serious is TransCanada in this question, but also contribute to the image of the company". Recently, Le Devoir had revealed that TransCanada is right now in negotiation with the Institute of marine science in Rimouski for the financing of a Research Chair on the St. Lawrence and the Beluga.
On top of these financial engagements, TransCanada should meet and try to rally influential Quebec personalities. The firm's list includes 19 names, like Brian Mulroney, Lucien Bouchard, Monique Jérôme-Forget, Pierre Marc Johnson, Denis Coderre, Régis Labeaume, Hydro-Quebec's CEO Thierry Vandal, and the president of the Caisse de dépôt et placement, Michael Sabia.
Counter the opposition
If it is important to find allies, Edelman also insists on the necessity of countering the opponents, that are, by the way, more and more numerous. "If nothing is done, the opponents of Energy East will use each bit of information available to attack the project and TransCanada." The firm does mention the necessity of establishing a precise profile of groups of opponents.
"In order to add obstacles to the opponents, we will work with third parties and we will feed them with information that they need to pressure the opponents and distract them from their mission", adds the public relations firm. These "third parties" could be, for example, "credible" voices recruited within the communities.
Amon the arguments to be used, those about economic benefits seem to be at the top of the list. Edelman estimates that after the recent elections, Quebecois have turned their backs to the national question and are now more preoccupied by economic problems. "In this context, the Energy East project could be presented as a new occasion to bring new life to Quebec's economy, thanks to the creation of new jobs and positive indirect effects in other sectors."
The firm recommends, for example, to use the argument of economic benefits to make the construction of an oil harbor in the heart of the Beluga nursery in the St. Lawrence more acceptable. "The economic impact of the project will be a strong argument to rally the Cacouna community to the project", insists the authors of the strategy prepared by Edelman.
The project must allow, once finished, the creation of 133 direct jobs in Quebec. The Energy East pipeline should transport 1,1 million of barrels of crude oil each day, the equivalent of 1335 tanker cars. The province would then become the most strategic point in Canada for the exportation of tar sand oil.
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