Wednesday, August 21, 2013
Le citoyen Encana - Le double visage de la plus importante corporation de Calgary
Durant une nuit pluvieuse du printemps 2006, Darrell Graff aidait une vache à mettre bas quand l'invasion gazière commença. EnCana éventait un puits. Le fermier de 30 ans a commencé à sentir son corps se raidir et bientôt il ne pouvait plus bouger ses jambes. Il appela Barbara, sa mère. Avec la lumière jetée de sa torche, elle savait qu'il souffrait d'une crise.
Ses propres mains déjà raides, la frêle Barbara de 57 ans glissait sur la boue, parvint à rejoindre son fils et l'aida à monter dans le camion. Elle était déjà à plusieurs kilomètres de leur ferme quand la crise de Darrell pris fin.
Barbara et Darrell sont tous les deux très sensibles aux produits chimiques. Dans le cas de Darrell, c'est si grave que les émissions générées par les puits de gaz naturel provoquent des contractions partielles de ses muscles moteurs et une fois, il a eu un arrêt cardiaque. Les Graff ont dit aux compagnies gazières, dont EnCana, de soit arrêter de relâcher du gaz de leurs puits ou au moins leur donner assez de pré-avis pour qu'ils puissent évacuer leur ferme. Jusqu'à date, ils ont eu très peu de coopération. "Cela menace notre survie," dit Barbara. "EnCana semble penser qu'elle est au-dessus de la loi."
La famille travaille la terre près de Vulcan, en Alberta, depuis 5 générations, et ils hésitent à laisser derrière eux la seule communauté qu'elle ait connue. Bien que depuis les dernières années, le développement gazier est devenu presque aussi important pour la municipalité de 2,000 âmes que l'agriculture.
Les Graff et la région de Vulcan sont la métaphore parfaite pour les deux visages d'EnCana. La plus importante compagnie énergétique du Canada a créé des emplois, attiré des investissements et investi de l'argent dans les communautés rurales partout dans les prairies canadiennes et l'ouest des États-Unis. Elle a aussi laissé une trainée de fermiers et de ranchers qui disent que la compagnie a ruiné leur propriété, les a rendus malades et tué leur bétail.
Établie en 2002 grâce à une fusion de deux compagnies plus petites, EnCana a utilisé une stratégie d'affaires fonceuse pour devenir à la tête de l'industrie pétrolière et gazière. C'est l'une des corporations du pays les plus rentables, avec $23 milliards de profits l'an dernier, et la 2e plus importante gazière du monde entier.
EnCana a laissé sa marque partout où elle a opéré. Cette année, elle projette de faire des dons de $35 millions à des organismes de charité dans des communautés du nord de la C.-B. jusqu'au Texas. Du Club des 4-H, ce fameux club des prairies qui enseigne aux enfants comment faire de l'agriculture, jusqu'au rodéos communautaires, tous ont profité de la philanthropie de cette compagnie. À Calgary, EnCana a construit un gratte-ciel d'un milliard de dollars qui est admiré par les critiques en architecture. Terminé, le Bow de 58 étages sera l'édifice le plus élevé du Canada à l'ouest de Toronto.
Par contre, pas tout le monde est heureux de cette compagnie. Des fermiers ont accusé EnCana d'avoir contaminé leur terre avec le gaz naturel. L'argent de la compagnie a servi à alimenter une bataille mortelle dans les forêts de l'Amérique du Sud entre les paysans et un gouvernement déterminé à construire un pipeline au travers une réserve faunique. Et deux ranchers de l'Alberta ont passé plus d'une année à se battre en cour contre EnCana pour obtenir rien de plus qu'une garantie de base que la compagnie n'empoisonnerait pas leur eau. Certains de ces problèmes sont très bien connus, d'autres ont été rapportés ici pour la première fois.
EnCana est un symbole de l'ouest. Indépendante et fière, la compagnie a mis au défi le contrôle du gouvernement et bouleverse la notion que seule une compagnie énergétique américaine ou européenne peut faire sa marque au niveau international. Pour la première fois, Fast Forward raconte l'histoire au complet du plus important succès d'affaires du Canada, et les gens en colère qu'elle laisse derrière elle.
La naissance d'un géant des prairies
À tous les jours quand il était un enfant, Gwyn Morgan se levait tôt pour nourrir le bétail sur la ferme familiale à Dogpound, une partie reculée des prairies à 80 kilomètres au nord-ouest de Calgary. L'homme qui sera à la tête de la plus grosse compagnie pétrolière et gazière du Canada n'avait pas d'eau courante jusqu'à l'âge de 12 ans. Le plus jeune de 4 enfants, élevé sévèrement, il a appris qu'on pouvait réussir à tout, si on s'y mettait sérieusement. Il finit par croire que ceux qui ne réussissent pas, c'est parce qu'ils n'y travaillent pas assez.
Morgan a laissé la maison vers la fin de son adolescence pour étudier l'ingénierie à l'université de l'Alberta. Pendant les prochaines années qui ont suivi, il a exploré l'Arctique pour du pétrole avec Norlands Petroleum avant de se trouver un emploi chez Alberta Energy Corporation (AEC) en 1975.
Le gouvernement provincial a créé AEC pour faire travailler les gains du pétrole, du gaz et des mines de l'Alberta au profit du peuple. Les actions de la compagnie étaient vendues aux citoyens de l'Alberta. Le gouvernement a aussi donné deux avantages à AEC: une part dans le consortium de Syncrude qui commençait tout juste à exploiter les sables bitumineux près de Fort McMurray, et le droit de forer dans la région de Suffield au nord de Medicine Hat.
Avec la croissance de la compagnie, le sort de Morgan s'améliora aussi. Il organisa les opérations de la compagnie à Suffield et devenu plus tard le chef de la division pétrole et gaz de la compagnie. En 1994, l'année suivant la privatisation de la compagnie par la province, Morgan a été promu comme PDG. Un nationaliste, son rêve était de créer une compagnie pétrolière et gazière de propriété canadienne d'équivalence avec les géants internationaux.
"Il est un gars très déterminé et intelligent," dit Dick Hskayne, un pétrolier de longue date et ancien membre du CA de AEC. "Il connaît l'ingénierie, et il connaît la business du pétrole, mais il a une vue plus large sur la vie et est très bon à prendre des décisions à implications politiques... que ce soit en environnement ou du domaine de la finance."
Morgan ne respecte pas le moule d'un baron pétrolier. Il parle distinctement, mange de la nourriture saine et fait de l'exercice pendant 90 minutes tous les jours. Il est svelte, un cercle de cheveux blancs sur une tête qui est presque chauve, et porte une paire de petites lunettes rondes. Son enfance difficile lui a laissé une éthique de travail stricte qui fait de lui un PDG sévère. Dans les années 1990, il a manigancé une série d'offres hostiles d'achat de compagnies plus petites, fournissant ainsi au AEC de vastes réserves de gaz naturel en Alberta, au Wyoming et au Montana, ainsi qu'une exploitation profitable de pétrole en Équateur.
Morgan vise enfin la plus grosse prise de toutes: les réserves de Canadian Pacific (CP). En 1880, le gouvernement fédéral a cédé à CP 100,000 kilomètres carrés de terrain pour se construire un chemin de fer, ainsi que le droit d'exploiter le charbon et le gaz naturel du sous-sol. En 2001, le gouvernement a mis de côté les ressources pétrolières et gazières de côté dans une compagnie privée appelée PanCanadian Energy. En octobre de la même année, Morgan a appelé le président de CP, David O'Brien, pour lui dire qu'il voulait discuter d'une fusion de AEC et PanCanadian. Suite aux pressions de Haskayne, O'Brien aquiesça.
Quelques jours plus tard, lui et Morgan on commencé à négocier secrètement la fusion de leurs compagnies. Au début, ils se rencontraient seuls dans des bureaux vides du CP sur le 18 étage de Bankers Hall. En janvier 2002, quand les deux hommes ont inclus leur personnel haut-gradé dans leurs discussions, ils ont déménagé l'endroit de leurs réunions dans des chambres louées de l'hôtel Hyatt au centre-ville de Calgary, à quelques coins de rues de là. Haskayne se rappelle que Morgan gardait les discussions informelles en se déguisant en jeans et transportant un sac à dos quand il se montrait à l'hôtel. C'était crucial de garder tout cela secret: si jamais on se rendait compte que AEC et PanCanadian négociait une fusion, les compagnies deviendraient des cibles pour des offres d'achat hostiles.
Pendant 3 mois, les discussions étaient gardées secrètes. Le dimanche 28 janvier, Morgan et O'Brien ont finalement dévoilé l'entente au public. Morgan dirigerait la nouvelle corporation, tandis que O'Brien aurait le titre honorifique de président. Toujours le patriote, Morgan baptisa la compagnie EnCana, "Energy Canada" écourté.
La nouvelle compagnie a adopté une stratégie d'affaires non conventionnelle. Plutôt que de chercher des nouvelles sources de pétrole et de gaz outre-mer, EnCana s'est concentré sur les avoirs principaux de son commerce en Amérique du Nord. Grâce aux ressources que les gouvernements canadien et de l'Alberta avaient accordé à PanCanadian et AEC, EnCana contrôlait de vastes champs d'exploitation gazière dans le sud de l'Alberta. La majorité du gaz conventionnel avait déjà été exploité. La compagnie a réalisé, toutefois, qu'avec la bonne technologie, elle pourrait extraire le gaz du roc autour des dépôts de gaz taris. La technologie s'appelle fracturation hydraulique, ou "fracing" (on prononce "fracking"). Cela comporte à injecter à haute pression du gaz ou de l'eau dans la terre pour fissurer le roc et faire relâcher le gaz. La technologie fonctionnait, et bientôt d'anciens champs d'exploitation recommençaient à produire de vastes quantités de gaz.
Entre-temps, les investissements de la compagnie en Équateur lui causaient des problèmes. EnCana a tenté de nettoyer les déversements de pétrole dans le pays qui avaient été laissés par les compagnies précédentes et a aidé à financer un OGNL local pour aider les fermiers à semer leurs champs de façon plus efficace. Toutefois, la compagnie connu des problèmes quand elle a acheté une partie d'un projet de construction d'un pipeline de 800 kilomètres de long pour transporter du pétrole brut venant de ses puits situés dans les jungles de l'est de l'Équateur vers la mer. Le tracé de l'oléoduc traversait une réserve faunique et dû faire face à de l'opposition venant des fermiers et des villageois sur son passage.
À un moment donné, des résidents de El Reventador, un village sur le tracé du pipeline, ont barricadé les routes sortant de la ville avec des pneus en feu. Après l'intervention de la police et la mort de deux protestataires, la barricade fut démontée. "Pour construire ce pipeline, il y a eut beaucoup de coercition," dit Nadja Drost, un réalisateur de films de Toronto qui a documenté la construction du pipeline. "Ce n'est pas un environnement très libre."
Des travailleurs sur le nouveau pipeline ont aussi percé un vieux tuyau et causé le déversement de 1,6 millions de litres de pétrole dans la rivière qui alimente l'eau pour Quito, la capitale de l'Équateur.
En 2005, Morgan a vendu les actions d'EnCana en Équateur à un consortium de compagnies chinoises, continuant sa stratégie de se départir du pétrole et du gaz conventionnel pour se concentrer sur la fracturation des puits de gaz naturel en Amérique du Nord. La stratégie fonceuse de Morgan, dont plusieurs PDG doutaient la sagesse, était largement lucrative. Les profits de la compagnie ont augmenté de plus de 65% en une seule année pour atteindre $5 milliards.
"EnCana avait une longueur d'avance avec les propriétés de PanCanadian," dit Bob Schulz, un expert en pétrole et en gaz de l'université de Calgary. Il reconnaît aussi la part qu'a joué la culture corporative dans le succès qu'a connu la compagnie. Par exemple, la compagnie a choisi ses gérants parmi son personnel sur le terrain, alors les chefs d'EnCana comprenaient ce qui se passait sur le terrain des vaches.
La culture corporative de la compagnie était aussi à l'écoute de l'opinion publique et sensible aux préoccupations environnementales. EnCana s’efforçait de rencontrer des groupes environnementaux et des propriétaires terriens pour discuter des problèmes. Et il ne faut pas oublier de mentionner la philanthropie de la compagnie: la politique de la compagnie est de faire un don d'un montant équivalent à un pourcentage de son revenu net à des organismes de charité et d'autres causes valables.
En octobre 2005, Morgan prit sa retraite comme PDG et léga son poste à son bras droit, Randy Eresman. Tout comme Morgan, le natif de Medicine Hat a commencé dans la compagnie comme un ingénieur et monta l'échelle à partir de là. Il a été un organisateur clé pendant la fusion, en intégrant les opérations d'ingénierie de la compagnie et a été vérificateur des avoirs de PanCanadian.
Mais contrairement à Morgan, il n'aime pas être à l'avant-scène. "Il est un gars très terre à terre, un gars de village, si l'on veut. Il est très compétent du côté technique, et les gens ont confiance en lui," dit Haskayne.
En décembre 2005, Morgan a fait le meilleur discour de sa carrière. À une réunion au Fraser Institute, qui est un organisme néo-libéral, le patriote canadien a expliqué sa vision pour le pays. Il vantait les mérites de baisser les taxes, un système de santé privatisé, et une approche du chacun pour soi. Il a monté sa compagnie à partir d'actifs qui lui avaient été donnés par le gouvernement, mais son message au secteur publique était bien clair: ne vous mêlez pas des vraies affaires.
"Il y a encore beaucoup de Canadiens qui ne comprennent encore pas que, ultimement, le succès de n'importe quelle société dépend de ceux qui travaillent plus fort à obtenir de meilleurs récompenses que ceux qui ne le font pas," il disait à son auditoire. Morgan était la preuve de son idéologie. Si un gars de la ferme peut se hisser au poste du plus puissant PDG du pays, n'importe qui pouvait le faire.
De Rosebud jusqu'à Rifle
Le village de Rosebud se niche entre les peupliers dans une vallée luxuriante, un oasis au centre des plaines sans fin à l'est de Calgary. Mieux reconnue pour son collège des arts du spectacle, et ses devantures colorées des habitations datant de la colonisation, la communauté d'une centaine de personnes est entourée des puits d'EnCana, et les forts bruits bourdonnant d'entretien des puits est habituel.
Jessica Ernst vit sur une propriété à 5 minutes de marche du centre-ville. La consultante en environnement travaillait pour EnCana durant l'été de 2003 quand la compagnie a construit une station de compression sur un promontoire à moins d'un kilomètre de chez elle. La station prend du gaz qui sort de terre et le compresse en liquide pour le transporter plus facilement, mais en ce faisant émet des bruits mécaniques très fort et grinçants qui l'empêchent de dormir.
Comme Morgan, Mme Ernst, âgée de 50 ans, a une forte personnalité qui la rend très à l'aise parmi les fermiers et ranchers de l'Alberta au caractère plutôt indépendant. Quand le bruit a commencé à la station de compression, elle refusa de se tenir tranquille.
Elle a fait assez de pression auprès de la compagnie pour qu'elle cesse le bruit. Elle l'a aussi convaincue de consulter la communauté. Selon elle, l'agent d'EnCana lui aurait montré une entente légale qu'il espérait faire signer par les propriétaires terriens qui exempterait la compagnie de toute responsabilité. "Si nous pouvons leur faire signer ceci, nous n'avons pas besoin de les consulter," lui a-t-il dit. Sur ce, Ersnt donna sa démission (NDLR: et mis fin à son contrat, elle était consultante indépendante pour EnCana, et non pas une employée).
Quand EnCana commença les consultations, les propriétaires terriens pouvaient faire très peu. Les propriétaires terriens possèdent seulement la surface de leurs terres. Tout ce qu'il y a en dessous, les minéraux, le pétrole et le gaz naturel, appartient à la province qui peut les vendre à des compagnies privées. Quand une compagnie veut forer un puits pour aller chercher le gaz, elle doit s'entendre avec le propriétaire terrien pour qu'il loue une partie de sa terre pour y construire le puits. Si ils ne peuvent pas s'entendre, la compagnie peut traîner le propriétaire terrien devant le comité Surface Rights Board (SRB) ou le comité Energy Resources Conservation Board (ERCB), deux filiales quasi-judiciaires de la province. Une fois que l'audience ait lieu, ils peuvent ordonner au propriétaire terrien de laisser la compagnie s'installer chez lui, ou ordonner la compagnie de respecter certaines conditions avant de commencer à forer.
En 2005, Mme Ernst a remarqué que quelque chose se passait avec l'eau de son puits. Au début, ses chiens ne voulaient plus la boire. Ensuite, elle a remarquée que l'eau faisait des bulles comme si elle était une boisson gazeuse. En décembre, elle ne pouvait plus fermer ses robinets: il y avait tellement de gaz dans son eau que cela augmentait la pression (dans les tuyaux) et le gaz se frayait un chemin dans sa plomberie.
Elle a aussi découvert qu'elle pouvait l'allumer. Avec un briquet, une grande flamme bleue s'allume à la surface de l'eau avant de tourner orangée et s'élancer haut dans les airs comme une torche. "Elle me fait toujours peur," dit-elle. "Je ne sais jamais ce que l'eau peut faire."
Des tests fait sur son eau ont révélé des niveaux élevés de méthane, d'éthane, et quelques autres combustibles fossiles. Il y avait aussi des traces d'hydrocarbures lourds, comme ceux utilisés dans les fluides de forages. Trois autres puits dans la région ont aussi des signes qu'ils ont des niveaux élevés de gaz. Au moins deux études ont démontré que quand un puits est fracturé, la pression peut fissurer la formation de roc et laisser fuir du gaz naturel dans l'eau souterraine. Des fluides de forage peuvent aussi contenir des quantités infimes de produits chimiques, comme du diesel ou de l'ammoniaque.
Par contre, EnCana a nié que ses fracturations ont contaminé la source d'eau potable de Rosebud. Plus tôt cette année, un rapport provincial sur le puits (d'eau potable) de Mme Ernst arrivait à la conclusion que le gaz dans le puits se retrouvait là naturellement et n'avait rien à voir avec la compagnie.
Mme Ernst a des doutes. Un rapport de 2005 de la compagnie, par exemple, démontre qu'EnCana a fracturé la nappe aquifère souterraine où les propriétaires terriens de la région prennent leur eau. Un test fait par Karlis Muehlenbachs, un expert en eau de l'université de l'Alberta, a aussi démontré des similitudes importantes entre le gaz dans le puits (d'eau potable) de Mme Ernst et le gaz qu'EnCana extrait du sol tout près.
À deux cent kilomètres de là, Shawn et Ronalie Campbell avaient des problèmes semblables. En 1999, un pipeline appartenant à PanCanadian, l'une des compagnies qui deviendraient EnCana, est devenu rouillé sous leur terre et a déversé des saumures sur un hectare de leur ferme près de Ponoka. Des sous-contractants ont commencé à réhabiliter leur terre, mais 9 années plus tard, les Campbell disent que les graminées dans la région où s'est produit la fuite ne poussent plus normalement. Durant l'été de 2005, l'un des puits d'eau potable des Campbell s'est tari. Quand il ont foré un nouveau puits pour le remplacer, l'eau faisait des bulles et sortait de leurs robinets. Des tests ont détecté la présence de gaz naturel dans l'eau: du méthane, de l'éthane, du propane et du iso-butane.
Jeff Locker et Louis Meeks, des fermiers près de Pavillion, au Wyoming, ont vu leur eau devenir mauvaise après qu'EnCana ait fait des fracturations hydrauliques dans leur région. L'eau de Locker a même virée noire. En 2004, il dit qu'EnCana lui a payé $21,000 en argent US en échange d'accepter de ne pas parler de ce qui s'est passé. L'année suivante, EnCana a foré un autre puits à l'ouest de chez lui et son eau a pris une couleur noire encore une fois, alors il a décidé de briser le silence.
Meeks dit que EnCana a offert de lui acheter sa propriété, mais n'a pas proposé de valeur pour sa propriété. "Je leur ai dit de me faire une offre que je ne pouvais pas refuser," dit-il. "Comment mettre une valeur à 30 années (passées ici)?"
Plus au sud, autour de Rifle, au Colorado, EnCana a laissé fuir du gaz naturel et du benzène, qui est un produit chimique cancérigène, dans un ruisseau, et a payé une amende de $371,200 en 2004. L'année suivante, un groupe de propriétaires terriens ont entamé un procès contre EnCana, allégeant que la compagnie ne leur avait pas payé toutes les redevances. La compagnie a déversé $40 millions pour régler le litige.
Dans le même esprit de son PDG fondateur aux penchants indépendants et anti-gouvernement, EnCana ne s'est jamais donné le trouble de faire application pour une licence de forage du gouvernement local à Rifle pendant 4 ans. EnCana devait plus de $100,000 en amendes non payées, et a obtempéré en payant $15,000 à la municipalité plus tôt cette année. La compagnie a aussi tenté d'arrêter le gouvernement du Colorado qui voulait imposer des règlements environnementaux plus sévères en menaçant de quitter la région, et en encourageant les organismes de charité qui avaient reçu leurs dons de faire des pressions auprès du gouvernement également.
Au Canada, la compagnie s'est débattu avec le gouvernement fédéral sur des droits de forage dans la région de Suffield au nord de Medicine Hat, l'une des dernières zones de prairie indigène qui survit au Canada. Le gouvernement a fait une enquête sur EnCana qui aurait construit un pipeline et plusieurs routes d'accès dans la réserve sans permission. En 2007, le pipeline de la compagnie a éclaté dans la région et a déversé 50,000 litres de pétrole et de saumures sous un milieu humide.
Fast Forward a parlé avec 20 fermiers et ranchers pour préparer ce reportage, et les mêmes préoccupations revenaient souvent: certains craignaient que la compagnie contaminait leur eau; d'autres accusaient la compagnie de permettre des mauvaises herbes de pousser sur leur terrain loué, ce qui nuisait à leurs récoltes; presque tous disaient que la compagnie de prenait pas leurs préoccupations au sérieux. Toutes ces plaintes ne sont rien à côté des problèmes de santé vécus par quelques-uns des propriétaires terriens qui ont eu affaire avec EnCana.
Laura Amos, une fermière dans la région de Rifle, est tombée malade avec un tumeur de glande surrénal rare en 2003 après qu'EnCana ait fracturé des puits dans la région. L'un des produits chimiques qu'aurait pu utilisé le sous-contractant durant les fracturations hydrauliques, le 2-BE, a des liens connus avec des tumeurs aux glandes surrénales. Chris Mobaldi a eu 2 tumeurs à sa glande hypophyse, ce qui pourrait avoir affaire à la pollution de l'air et de l'eau générée par les activités gazières d'EnCana selon elle. La compagnie, par contre, nie toute responsabilité. Elle dit que ses sous-contractants n'utilisent jamais de 2-BE durant leurs opérations de fracturations.
Barbara et Darrell Graff, mère et fils qui ont une ferme près de Vulcan, ont commencé à remarquer leur réaction aux produits chimiques en 1998 quand Darrell s'est presque effondré dans son champ pendant qu'une torchère d'une autre compagnie brûlait près de chez lui. En 2000, la famille, incluant Larry, le père de Darrell, et sa soeur Anita, sont déménagés de leur ferme à l'est de Vulcan sur une plus petite terre à l'ouest de la ville pour fuir les émanations aériennes. Quatre ans plus tard, EnCana a commencé à forer près de leur nouvelle résidence. Les Graff ont mis la compagnie au courant de leur état de santé et lui a demandé de les avertir quand elle se préparerait à allumer une torchère pour que la famille puisse évacuer. "Quand ils sont arrivé initialement dans cette région propre, nous leur avons mis au courant de nos preuves médicales," dit Barbara. "Ils ont rarement tenu compte de ce que nous leur disions. Je ne comprends pas çà." Ils disent que la ferme a aussi perdu quelques vaches depuis que les activités gazières ont commencé dans la région. (Les avocats d'EnCana insistent pour dire que les opérations de la compagnie dans la région n'ont pas d'impacts négatifs sur les Graff.)
À premier abord, Darrell semble être un fermier typique de la région sud de l'Alberta, bien bronzé, une barbe brune très drue, et très avenant. Toutefois, ses symptômes sont si graves qu'il doit marcher avec une cane, et il ne peut pas accomplir la plupart du boulot qu'il faisait avant de tomber malade. Tout ce qu'il réussi à faire, finalement, c'est de prendre soin des vaches.
Kaye Kilburn, un neurologue de Los Angeles qui a examiné les Graff, croit que l'empoisonnement dû au gaz sulfureux est à blâmer pour l'état de santé de Barbara et Darrell. Il dit que la substance est nuisible, même en de faibles concentrations comme une partie par million, et affirme que c'est pire que le chlore ou les gaz cyanogènes utilisés durant la Première Grande Guerre. "Si cela ne vous tue pas, le cerveau est endommagé," dit-il. "C'est un poison de première classe."
Une nouvelle sorte de compagnie
La barrière s'ouvre et un cowboy galope dans l'arène. Devant lui, il y a un boeuf brun et musclé qui court, deux pas en avant de son cheval. En le rattrapant, le cowboy se projette de sa monture et empoigne les cornes du bovin. Il tord la tête de l'animal de côté et le tire vers le sol brunâtre de l'arène, ensuite tord tout son corps pour que le bovin se retrouve les pattes en l'air.
C'est la Journée du Canada à Ponoka. Une bonne partie de la population de 6,000 âmes sont là pour voir les finales du rodéo. Le soleil plombe sur les cowboys assis sur leurs montures et qui attendent leur tour pour maîtriser un bovin dans l'arène, des enfants se promènent dans l'estrade pour vendre des breuvages, et des collines vertes et fertiles pleines de récoltes s'étendent tout autour de l'arène.
Bien sûr, l'agriculture n'est pas le seul moteur économique de la région. Le pétrole et le gaz sont tout aussi importants pour l'économie locale, et l'industrie le laisse bien savoir. Les panneaux noirs, blancs et verts d'EnCana ornent les bandes de l'arène. Et une bannière d'EnCana pend au-dessus de la barrière à un bout de l'arène. Quand l'annonceur prend une minute de répi pour remercier les commanditaires de l'évènement, une jeune fille blonde sur un cheval gris galope autour de l'arène portant un drapeau d'EnCana.
Ronalie et Shawn Campbell, des fermiers dont le puits d'eau potable a été contaminé avec du gaz naturel, sont venus en ville pour voir le spectacle. Après des années d'avoir essayé de voir à ce que les gazières prennent leurs responsabilités, ils ont gagné une bataille juridique cruciale avec EnCana qui pourrait changer la façon d'opérer de la compagnie.
Cela a commencé en février 2006, quand EnCana a pris le contrôle d'un puits gazier sur la terre des Campbell qui appartenait à une autre compagnie. Ils ont demandé à EnCana de signer un bail qui contenait quelques mesures de protection: parmi d'autres, la compagnie isolerait le puits pour arrêter le gaz de s'infiltrer dans le sol et contaminer l'eau potable, et faire le monitorage de l'eau pour détecter des contaminations. La compagnie a refusé.
En juillet 2007, EnCana a présenté ce dossier au SRB, espérant obtenir le droit de fracturer sans rencontrer les conditions incluses dans le bail. Durant une audience à Ponoka, les avocats de la compagnie ont questionné les Campbell pendant 3 heures. "Nous avons subit une contre-interrogatoire sur tous les sujets possibles et imaginables," dit Ronalie. "Ils nous demandaient 'quel est la raison d'être de faire des tests sur l'eau?'" Shawn se sentait bombardé par les questions d'EnCana, et pensait qu'ils n'avaient aucune chance (de gagner).
En Novembre 2007, le SRB a rendu une décision. À la surprise des Cambell, ils ont gagné leur cause. EnCana aurait le droit d'utiliser le puits, mais seulement si la compagnie respecte les conditions dans le bail. Toutefois, la compagnie n'était pas disposée à baisser les bras. Elle alla en appel à la Cour du Banc de la Reine, et le dossier alla en cour le 9 avril à Edmonton. Encore une fois, le juge trancha en faveur des Cambell. Pour la première fois en Alberta, une cour légale obligea EnCana de protéger l'eau souterraine d'un fermier.
La compagnie elle-même connait beaucoup d'activité ces derniers jours. Le 11 mai, elle a annoncé qu'elle se scinderait en 2. Ses avoirs gaziers, représentant environ deux tiers de la compagnie, deviendra une compagnie menée par le PDG d'EnCana, Randy Eresman. Les projets pétroliers formeraient une deuxième compagnie plus modeste. L'idée est de laisser chacune des divisions de la compagnie de se concentrer sur ses propres opérations.
À première vue, la division semble être un rejet de ce que l'idée de Gwyn Morgan se faisait de la compagnie: la seule compagnie pétrolière et gazière canadienne qui pouvait rivaliser avec ses compétiteurs américains et européens. Les observateurs de l'industrie ne sont pas de cet avis. Diviser EnCana en 2 identités fera de chaque compagnie un investissement plus sécuritaire, et la compagnie gazière sera tout de même la deuxième plus importante du monde, et le rêve de Morgan se poursuit.
Une iconoclaste, sa stratégie d'affaire inhabituelle a fonctionné pour cette compagnie. Ainsi que certaines de ses tentatives à être plus environnementalement et socialement consciencieuse. En réaction aux préoccupations du public vis-à-vis des torchères, par exemple, EnCana a diminué considérablement l'usage de cette pratique. "Ils ont réellement créé un nouveau genre de compagnie, sensible aux parties prenantes," dit Keith Brownsey, un professeur du collège Mount Royal College à Calgary. "Une grande partie de l'industrie a copié son modèle d'opérations d'EnCana."
C'est pas tout le monde qui est d'accord, par contre. Les problèmes de santé de Darrell et Barbara Graff sont si graves, qu'ils ont dû évacuer de leur maison la semaine dernière pour éviter le gaz. Au moment de mettre sous presse, ils vivent dans leur camionnette. Larry est moins dérangé par le gaz que son fils et son épouse, et tente de garder sa ferme en marche du mieux qu'il le peut. Se battre contre une compagnie qui engage tant de personnes dans une petite communauté n'est pas facile, et ses voisins propriétaires terriens hésitent à dénoncer. Pendant qu'il pointe du doigt le puits qu'il pense être à la source des problèmes qui obligent sa famille de quitter leur terre, un groupe d'hommes habillés de combinaisons se pointent sur la plate-forme et le dévisagent, séparés par un champs parfumé de canola en fleur entre eux.
Le paysage est très semblable à celui de Dogpound, où l'homme le plus prospère de l'industrie énergétique du Canada a déjà bûché pour gagner sa vie. Des montagnes s'élèvent à l'ouest, des champs verts d'orge et de foin sous le ciel des prairies suivant l'arc courbé de la terre, et des vagues de chaleur s'élèvent du sol comme du gaz.
Publié le 10 juillet 2008, signé: Adrian Morrow.
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"Citizen Encana
The double life of Calgary’s greatest corporation
On a rainy spring night in 2006, Darrell Graff was birthing a cow when the gas came rolling in. EnCana was venting a well. The 30-year-old farmer started to stiffen up and soon he couldn’t move his legs. He shouted to his mom, Barbara. From the light of her flashlight, she could tell he was having a seizure.
Her own hands stiffening, the petite, 57-year-old Barbara slid through the mud, grabbed her son and loaded him into a truck. She had to drive several kilometres away from their farm before Darrell’s seizure subsided.
Both Darrell and Barbara are extremely sensitive to chemicals. Darrell’s case is so severe that emissions from natural gas wells can cause partial motor seizures and, on one occasion, nearly gave him a heart attack. The Graffs have told the natural gas companies, including EnCana, to either stop releasing gas off their wells or at least give them enough warning so they can evacuate their farm. So far, they say they’ve had little success. “This is life-threatening,” says Barbara. “EnCana seems to think they are above the law.”
The family has farmed the country near Vulcan, Alberta for five generations, and they’re reluctant to leave the only community they’ve known. Though, in recent years, gas development has become almost as important to the 2,000-strong town as agriculture.
The Graffs and the Vulcan area are the perfect metaphor for the two sides of EnCana Corporation. Canada’s largest energy company has created jobs, brought investment and poured money into rural communities across the Canadian Prairies and the western United States. It has also left a trail of farmers and ranchers who say the company has ruined their land, made them sick and killed their livestock.
Formed in 2002 by a merger of two smaller companies, EnCana has used a daring business strategy to put itself at the cutting edge of the oil and gas industry. It is one of the country’s most profitable corporations, with $23 billion in revenue last year, and the second-largest natural gas company in the world.
EnCana has made its mark everywhere it operates. This year, it plans to donate $35 million to charities in communities from northern B.C. to Texas. Everything from the 4-H Club — the iconic prairie club that teaches kids farming skills — to community rodeos have benefited from the company’s philanthropy. In Calgary, EnCana is building a billion-dollar skyscraper whose design has garnered praise from architecture critics. When finished, the 58-storey Bow will be Canada’s tallest building west of Toronto.
However, not everyone is happy with the company. Farmers have accused EnCana of contaminating their land with natural gas. The company’s money helped fuel a deadly fight in the South American rainforest between peasants and a government determined to build a pipeline through a nature preserve. And two Alberta ranchers have spent over a year fighting EnCana in court for nothing more than a basic guarantee that the company won’t poison their water. Some of these problems are well-known, others are reported here for the first time.
EnCana is a symbol of the West. Independent and proud, the company has defied government control and exploded the idea that only an American or European energy company can rate on an international scale. For the first time, Fast Forward tells the full story of Canada’s greatest business success, and the angry people left in its wake.
BIRTH OF A PRAIRIE GIANT
Every day when he was a kid, Gwyn Morgan would get up early to feed the livestock on the family farm at Dogpound, a stretch of desolate prairie 80 kilometres northwest of Calgary. The man who would go on to lead Canada’s largest oil and gas company didn’t have access to running water until he was 12. The youngest of four children, his tough upbringing left him with the belief that you could achieve anything you wanted if you worked for it. Those who didn’t succeed, he would come to believe, weren’t trying hard enough.
Morgan left home in his late teens to study engineering at the University of Alberta. Over the next few years, he explored the Arctic for oil with Norlands Petroleum before landing a job at Alberta Energy Corporation (AEC) in 1975.
The provincial government created AEC to put Alberta’s oil, gas and mineral wealth to work for its people. Shares in the company were sold to Alberta’s citizens. The government also handed AEC two key assets: a stake in the Syncrude consortium that was just starting to mine the oilsands near Fort McMurray, and the right to drill in the Suffield area north of Medicine Hat.
As the company grew, Morgan’s star rose. He set up the company’s operations at Suffield and later became head of the company’s oil and gas division. In 1994, the year after the province privatized the company, Morgan was promoted to CEO. A nationalist, his dream was to create a Canadian-owned oil and gas company that could stand shoulder-to-shoulder with the international giants.
“He’s a very determined, smart guy,” says Dick Haskayne, a veteran oilman and former AEC board member. “He knows engineering, and he knows the oil business, but he has a broader outlook on life and is very good at making judgments on political implications… whether it’s the environment or finance.”
Morgan doesn’t fit the stereotype of an oil baron. He speaks with a clear diction, eats health foods and works out for 90 minutes a day. He has a slim physique, a rim of white hair surrounding his balding head, and sports a pair of small round glasses. His hard childhood left him with a strong work ethic that made him a tough CEO. In the 1990s, he engineered a series of hostile takeovers of smaller companies, giving AEC vast reserves of natural gas in Alberta, Wyoming and Montana, as well as a lucrative oilfield in Ecuador.
Morgan eventually set his sights on the biggest prize of all: the reserves of Canadian Pacific (CP). In 1880, the federal government gave CP 100,000 square kilometres of land to build the railway, as well as the right to extract the coal and natural gas under its surface. In 2001, the government set these oil and gas resources aside as a private company called PanCanadian Energy. That October, Morgan called CP chairman David O’Brien, telling him he wanted to discuss about merging AEC and PanCanadian. At Haskayne’s urging, O’Brien agreed to talk.
A few days later, he and Morgan began secretly negotiating the merger of their companies. At first, they met alone in CP’s vacant offices on the 18th floor of Bankers Hall. In January 2002, when the two men brought their high-level staff into the discussions, they moved the meetings to rented rooms at Calgary’s downtown Hyatt, a few blocks away. Haskayne recalls that Morgan kept the discussions low-key by disguising himself in jeans and carrying a backpack when he showed up at the hotel. Secrecy was crucial: if anyone found out that AEC and PanCanadian were negotiating a merger, the companies could become targets for hostile takeovers.
For three months, the talks were kept under wraps. On Sunday, January 28, Morgan and O’Brien finally made the deal public. Morgan would lead the new corporation, while O’Brien would take the honorary role of chairman. Always the patriot, Morgan named the company EnCana, a shortened version of “Energy Canada.”
The new company adopted an unconventional business strategy. Rather than look for new sources of oil and gas overseas, EnCana focused on its core business in North America. Thanks to the resources the Canadian and Alberta governments had granted PanCanadian and AEC, EnCana controlled vast gas fields in southern Alberta. Most of the conventional natural gas was already tapped out. The company, however, realized that with the right technology, it could extract gas from the rocks around the depleted gas deposits. The technology is called hydrolic fracturing, or “fracing” (pronounced “fracking.”) It entails shooting high-pressure gas or water into the ground to smash open the rock and release the gas. The technology worked, and soon old fields were producing mass quantities of gas again.
Meanwhile, the company’s investment in Ecuador was causing it headaches. EnCana tried to clean up oil spills in the country left by previous companies and funded a local NGO to help farmers sow their fields more effectively. However, the company soon ran into trouble when it bought a stake in a project to build an 800-kilometre-long pipeline project intended to transport crude oil from the company’s wells in Ecuador’s eastern jungle to the sea. The pipe was routed through a nature preserve and faced opposition from farmers and villagers along the way.
On one occasion, residents of El Reventador, a village on the route of the pipeline, barricaded roads outside of town with flaming tires. After police moved in and two protestors were killed, the blockade was lifted. “To construct that pipeline there was a lot of coercion,” says Nadja Drost, a Toronto filmmaker who documented the building of the pipe. “It was not a very free environment.”
Workers on the new pipeline also ruptured an old pipe and spilled 1.6 million litres of oil into the river that supplies Quito, Ecuador’s capital, with water.
In 2005, Morgan sold off EnCana’s holdings in Ecuador to a consortium of Chinese companies as part of his strategy of divesting the company of conventional oil and gas to focus on fracing natural gas wells in North America. The daring strategy, which some of Morgan’s fellow CEOs had doubted, was paying huge dividends. The company’s profits had jumped more than 65 per cent in a single year to $5 billion.
“EnCana had a head start with the PanCanadian lands,” says Bob Schulz, an oil and gas expert at the University of Calgary. He also credits EnCana’s modern corporate culture with the company’s success. For instance, the company chose its management from among its personnel in the field, so EnCana’s leadership understood what was happening on the ground.
The company’s corporate culture was also sensitive to public opinion and responsive to environmental concerns. EnCana made a point of meeting with environmental groups and landowners to discuss problems. Not to mention the company’s philanthropy: company policy is to donate a percentage of net revenue to charities and other worthy causes.
In October of 2005, Morgan retired as CEO and turned over the job to his second-in-command, Randy Eresman. Like Morgan, the Medicine Hat-born Eresman started with the company as an engineer and worked his way up. He was a key organizer during the merger, integrating the company’s engineering operations and auditing PanCanadian’s assets.
Unlike Morgan, however, he spurns the spotlight. “He’s a very down-to-earth, small-town guy, if you will. He’s very technically competent, people trusted him,” says Haskayne.
In December 2005, Morgan gave the most famous speech of his career. At a meeting of the Fraser Institute, a neo-liberal think-tank, the Canadian patriot laid out his vision for the country. He expounded on the merits of lower taxes, a privatized health-care system and a do-it-yourself attitude. He had built his company on assets donated by the government, but his message to the public sector was clear: stay out of business’s way.
“There are still many Canadians who fail to grasp that, ultimately, the success of any society is dependent upon those who try harder achieving better rewards than those who don’t,” he told his audience. Morgan was living proof of his own ideology. If a farm boy from Dogpound could rise to become one of the country’s most powerful CEOs, couldn’t anyone?
FROM ROSEBUD TO RIFLE
The village of Rosebud sits among poplar trees in a lush valley, an oasis on the endless plains east of Calgary. Best known for its performing arts college and brightly painted frontier buildings, the community of 100 people is surrounded by EnCana’s wells, and the loud, buzzing noise of well maintenance is a common sound.
Jessica Ernst lives on an acreage a five-minute walk from town. The environmental consultant was working for EnCana in the summer of 2003 when the company built a compressor station on the bluffs less than a kilometre from her house. The station, which takes gas from the ground and compresses it into a liquid that can be easily shipped, emits loud, grinding, mechanical noises that keep Ernst up at night.
Like Morgan, the 50-year-old Ernst has a tough personality that puts her at home among the independent-minded farmers and ranchers of Alberta. When the noise started at the compressor station, she refused to keep quiet.
She unsuccessfully pressured the company to stop the noise. She also pushed it to consult with the community. By her account, EnCana’s agent showed her a legal agreement it hoped to get landowners to sign, which would release the company from liability. “If we can get them to sign this, we don’t need to consult,” he said. Ernst quit the company.
When EnCana did start consultations, there was little landowners could do. Landowners only own the surface of their land. Everything underneath — minerals, oil and natural gas — belongs to the province, which can sell it to private companies. When a company wants to drill a well to access the gas, it has to make a deal with the landowner to lease part of their land to build the well on. If they can’t reach an agreement, the company can take the landowner to the Surface Rights Board (SRB) or the Energy Resources Conservation Board (ERCB), two quasi-judicial provincial bodies. Once a hearing into the case has been conducted, they can order the landowner to let the company in, or order the company to fulfil certain conditions before drilling.
In 2005, Ernst noticed something was happening to the water from her well. At first, her dogs wouldn’t drink it. Then, she saw it was fizzing as if it was carbonated. In December, she couldn’t turn her taps off: there was so much gas in her water, it raised the pressure and forced its way through her pipes.
She also discovered she could light it on fire. When lit, a huge blue flame burns on the surface of the water, before turning orange and escaping upward like a flare. “It still scares me,” she says. “You never know what the water is going to do.”
Tests on her water revealed high levels of methane, ethane and several other fossil fuels. It also showed signs of heavy hydrocarbons, like the ones used in drilling fluids. Three other area wells have shown high levels of gas. At least two studies have shown that, when a well is fraced, the pressure can break through the bedrock and leak natural gas into the groundwater. Drilling fluids can also contain trace amounts of chemicals, ranging from diesel to ammonium.
EnCana, however, denied that its fracing had contaminated Rosebud’s water supply. Earlier this year, a provincial report on Ernst’s well concluded that the gas in the well was naturally occurring and had nothing to do with the company.
Ernst has doubts. A company report from 2005, for instance, shows that EnCana fraced the underground aquifer where area landowners get their water. A test by University of Alberta water expert Karlis Muehlenbachs also showed strong similarities between the gas in Ernst’s well and the gas EnCana was pumping out of the ground nearby.
Two hundred kilometres away, Shawn and Ronalie Campbell were having similar problems. In 1999, a pipeline belonging to PanCanadian, one of EnCana’s forerunners, corroded under their land and spilled saltwater onto a hectare of their farm near Ponoka. Contractors have started to remediate the land, but, nine years later, the Campbells say the grass in the area of the spill is stunted. In the summer of 2005, one of the Campbells’ water wells went dry. When they replaced it with a new well, the water bubbled and spurted out of the tap. Testing indicated the presence of natural gas in the water supply: methane, ethane, propane and iso-butane.
Jeff Locker and Louis Meeks, farmers near Pavillion, Wyoming, have seen their water go bad in the wake of EnCana fracing in the area. Locker’s water even turned black. In 2004, he says EnCana paid him $21,000 US in exchange for agreeing not to talk about what had happened. The following year, EnCana drilled another well to the west of his place and his water turned black again, so he decided to break his silence.
Meeks says EnCana has offered to buy him out, but hasn’t set a price for his property. “I’ve told them to make me an offer I can’t refuse,” he says. “How do you put a price on 30 years?”
Further south, in the area around Rifle, Colorado, EnCana leaked natural gas and benzene, a carcinogenic chemical, into a creek, and paid a $371,200 fine in 2004. The following year, a group of area landowners sued EnCana, alleging the company hadn’t paid them what it owed in royalties. The company has agreed to pay $40 million to settle the suit.
In line with the independent, anti-government politics of its founding CEO, EnCana also never bothered applying for a drilling license from the local government in Rifle for four years. EnCana owed over $100 million in unpaid fines, and agreed to pay $15,000 to the municipality earlier this year. The company has also been trying to stop the Colorado government from imposing stricter environmental regulations by threatening to pull out of the area, and encouraging the charities it donates to to apply pressure on the government as well.
Back in Canada, the company has fought with the federal government over its drilling rights in the Suffield area north of Medicine Hat — one of the last stretches of native prairie left in Canada. The government has investigated EnCana for allegedly building a pipeline and several roads on the preserve without permission. In 2007, a company pipeline burst in the area and spilled 50,000 litres of oil and saltwater under a wetland.
Fast Forward spoke with 20 farmers and ranchers while preparing this story, and the same concerns came up frequently: some were afraid the company was contaminating their water; some accused the company of allowing weeds to grow on their leases, endangering their crops; almost everyone said the company wasn’t taking their concerns seriously. All these complaints pale next to the health problems experienced by a few of the landowners who’ve crossed paths with EnCana.
Laura Amos, a farmer in the Rifle area, became sick with a rare adrenal gland tumor in 2003 after EnCana fraced wells in the area. One of the drilling chemicals the company’s contractor might have used, 2-BE, has been linked to adrenal gland tumors. Chris Mobaldi had two tumors on her pituitary gland, something she alleges could be linked to air and water pollution from EnCana’s gas activity. The company, however, denies responsibility. It says its contractors never used 2-BE in their fracing operations.
Barbara and Darrell Graff, the mother and son who farm near Vulcan, first noticed their chemical sensitivity in 1998 when Darrell nearly collapsed in his field during a well flaring by a different company. In 2000, the family, which includes Darrell’s father Larry and sister Anita, moved from their original farm east of Vulcan to a smaller parcel west of town to escape the fumes. Four years later, EnCana started drilling near their new place. The Graffs told the company about their condition and asked that the company inform them when they were planning to flare so the family could evacuate. “When they initially came into this clean area, we gave them our medical evidence,” Barbara says. “Very seldom have they given us notice. I can’t understand this.” They say the farm has also lost several cows since the gas activity came to the area. (EnCana’s lawyer insists the company’s operations in the area have no negative impact on the Graffs.)
At first glance, Darrell seems like a typical southern Alberta farmer, with a deep tan, a rugged brown beard and a friendly demeanour. However, his symptoms are so bad, he walks with a cane, and he’s unable to perform most of the tasks he could before he became sick. Virtually all he can do is tend the cows.
Kaye Kilburn, a Los Angeles-based neurologist who has examined the Graffs, believes poisoning from hydrogen sulfide gas is to blame for Barbara and Darrell’s condition. He says the substance is harmful in as small a concentration as one part per million, and argues it is worse than chlorine or the nerve gases used in the First World War. “If it doesn’t kill you, it produces brain damage,” he says. “It’s a first-class poison.”
A NEW TYPE OF COMPANY
The gate springs open and a cowboy gallops into the ring. Ahead of him is a lean, brown bull, running just a few steps in front of the horse. As he catches up, the cowboy dives off his mount and grabs the steer’s horns in his hands. He twists the animal’s head to the side and drags it down to the brown dirt of the arena floor, then pulls its body around until the bull is lying on its back, its legs in the air.
This is Canada Day in Ponoka. A good chunk of the town’s 6,000 people have crammed into the bleachers to watch the rodeo finals. The sun is baking the cowboys sitting on their horses and waiting for their turn to wrestle steers in the ring, kids meander through the stands selling drinks, and fertile green hills dotted with crops stretch beyond the arena.
Agriculture, of course, isn’t the only game in town. Oil and gas are just as important to this area’s economy, and the industry has made its presence known. EnCana’s black, white and green signs line the side of the arena. An EnCana banner hangs overtop the gate at one end of the ring. When the announcer takes a break from the rodeo to thank the event’s sponsors, a blond girl on a grey horse gallops past the spectators, waving an EnCana flag.
Ronalie and Shawn Campbell, farmers whose water well was contaminated with natural gas, have come to town for the show. After years of trying to hold gas companies accountable, they’ve won a crucial court battle with EnCana that could change the way the company operates.
It started in February 2006, when EnCana took over a gas well on the Campbells’ land from another company. They asked EnCana to sign a lease with several protections: among others, the company would insulate the well to stop gas from travelling through the ground and contaminating the drinking water, and monitor the water for contamination. The company refused.
In July 2007, EnCana took the matter to the SRB, hoping to be granted the right to frac without fulfilling the conditions in the lease. At a hearing in Ponoka, company lawyers questioned the Campbells for three hours. “We were cross-examined on everything under the sun,” says Ronalie. “They were asking ‘what was the basis for the water testing?’” Shawn felt pummelled by EnCana’s questioning, and thought they didn’t stand a chance.
In November 2007, the SRB issued a ruling. To the Campbells’ surprise, they won. EnCana would have the right to use the well, but only if the company followed the conditions in the lease. However, the company wasn’t ready to give in. It appealed the decision to the Court of Queen’s Bench, and the case went to trial April 9 in Edmonton. Again, the judge ruled in the Campbells’ favour. For the first time in Alberta, a court required EnCana to protect a farmer’s groundwater.
The company itself is experiencing a flurry of activity these days. On May 11, it announced it would split in two. Its natural gas holdings, which represent roughly two-thirds of the company’s assets, will become one company led by EnCana CEO Randy Eresman. The company’s oilsands projects will form a second, smaller company. The plan is to allow each of the company’s two divisions to focus on its own operations.
At first glance, the split seems like a repudiation of what Gwyn Morgan created the company to be: the only Canadian oil and gas company to rival the size of their American and European competitors. Industry observers say otherwise. Breaking EnCana into two entities will likely make each company a safer investment, the gas company will still be the world’s second-largest and Morgan’s dream won’t disappear.
An iconoclast, his unusual business strategy worked for the company. So, too, have some of its attempts to be more environmentally and socially conscious. In response to public concern over flaring, for instance, EnCana drastically cut its use of the practice. “They’ve really created a new type of company, sensitive to stakeholders,” says Keith Brownsey, a professor at Calgary’s Mount Royal College. “Much of the industry has taken their lead from EnCana.”
Not everyone agrees, however. Darrell and Barbara Graff’s health problems are so bad, they had to evacuate their home last week to avoid the gas. As of press time, they are living in their van. Larry is less affected than his son and his wife, and is trying to maintain their farm as best he can. Fighting a company that employs so many people in a small community isn’t easy, and fellow landowners are reluctant to speak up. As he points out the well that he believes is responsible for forcing his family from their land, a group of coverall-clad men gather on the platform and stare back at him across a sweet-smelling, yellow field of canola.
The view is not unlike the landscape at Dogpound, where the most successful man in Canada’s energy industry once eked out a living. Mountains stand in the west, green fields of barley and hay meet the dusty prairie sky at the curve of the earth, and heatwaves rise like gas from the ground.
Published July 10, 2008 by Adrian Morrow in News"
Link: http://www.ffwdweekly.com/article/news-views/news/citizen-encana/
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