Thursday, August 7, 2014
Le pétrole des sables bitumineux arrive sur le Saint-Laurent
Exclusif - Radio-Canada a appris que le pétrole que la compagnie Suncor achemine par train à Sorel-Tracy depuis trois semaines est un produit lourd, non raffiné, issu des sables bitumineux de l'Alberta. Par ailleurs, la pétrolière confirme pour la première fois que les navires sont destinés à l'exportation. L'arrivée de ce pétrole inhabituel au Québec entraîne le renforcement de plusieurs mesures de sécurité.
Un reportage de Thomas Gerbet
Le bruit des freins résonne aux installations de Kildair, au bord du fleuve, à Sorel-Tracy. Comme tous les jours depuis la mi-juillet, une trentaine de wagons arrivent au ralenti pour décharger leur contenu de pétrole.
« Nous acheminons du pétrole lourd de l'ouest par train jusqu'à la raffinerie de Montréal depuis décembre 2013, mais à Sorel [pour charger les navires], c'est la première fois », confirme la porte-parole de Suncor, Nancy White.
Pour l'occasion, Suncor, a remplacé les tristement célèbres DOT-111 par une nouvelle génération de wagons, plus épais et résistants. Quant au Canadien National, il a réduit la vitesse des convois et inspecte deux fois par semaine la voie ferrée qui traverse la Montérégie.
La compagnie Kildair, qui stocke le pétrole avant de le charger sur des navires, a également renouvelé ses équipements de sécurité et ses infrastructures. « Le pétrole brut, pour nous, c'est une nouvelle commodité », explique le PDG Daniel Morin, qui fait des affaires depuis déjà depuis plusieurs années dans le domaine du mazout ou du bitume. « La soupe aux légumes, tout le monde sait à quoi ça ressemble, mais celle du restaurant du coin est différente de l'autre restaurant ».
Kildair a placé des gicleurs tous les 40 mètres, le long des rails, et s'est équipée d'un wagon spécial d'intervention en cas d'incendie, en partenariat avec la Ville de Sorel-Tracy. Un protocole est en cours de préparation pour offrir une assistance à d'autres municipalités de la Montérégie en cas d'incident.
« On comprend très bien l'inquiétude des gens, à la suite de l'incident de Lac-Mégantic », dit le maire de Sorel-Tracy, Serge Péloquin. « Mais le projet d'entreposage du pétrole chez Kildair, ça fait déjà un an et demi que nos équipes d'intervention d'urgence y travaillent. À Sorel-Tracy, ville d'industrie lourde, la gestion du risque, ça fait partie de notre culture. »
Suncor et Kildair n'ont pas eu besoin de passer par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement pour faire transiter le pétrole albertain par Sorel-Tracy. « Il a été déterminé avec les autorités gouvernementales qu'il n'y avait pas de nécessité de faire [des audiences publiques]. On a travaillé avec le ministère de l'Environnement et la Régie du bâtiment pour avoir tous les permis requis », explique le PDG de Kildair, Daniel Morin.
Le ministère de l'Environnement explique qu'il n'y a des audiences publiques que pour l'implantation d'un installation. Or, dans ce cas, Kildair réutilise des réservoirs qui existaient déjà. La compagnie n'avait donc besoin que d'un certificat d'autorisation, qu'elle a obtenu en décembre 2013 après avoir démontré que les mesures de sécurité avaient été renforcées.
Environnement
En cas de déversement, le pétrole lourd issu des sables bitumineux serait encore plus dommageable pour le Saint-Laurent que du pétrole léger comme à Lac-Mégantic. « Les résidus bitumineux sont beaucoup plus récalcitrants, beaucoup plus difficiles à éliminer du milieu naturel et beaucoup plus toxiques », explique Émilien Pelletier, professeur spécialisé en chimie et écotoxicologie à l'Institut des sciences de la mer de Rimouski. Il explique que le pétrole lourd est susceptible de couler plus rapidement au fond de l'eau et est moins vite dégradé par les bactéries que du pétrole de schiste, par exemple.
Commerce international
L'entente entre Kildair et Suncor relative au chargement des bateaux courra sur plusieurs années. « Kildair nous offre plus d'options de transport et un meilleur accès au marché », précise la porte-parole de la pétrolière, Nancy White. Elle explique que les bateaux qui quitteront Sorel au rythme d'un ou deux par mois dès la mi-septembre seront destinés à des raffineries nord-américaines.
D'autres destinations sont envisagées, mais Suncor ne veut pas donner de détails stratégiques. En revanche, la pétrolière se donne l'option d'alimenter également sa raffinerie de Montréal en passant par Sorel. Pourquoi ce détour? Selon nos informations, ce serait parce que les capacités de stockage de Montréal sont plus limitées qu'à Sorel-Tracy.
Des écologistes inquiets
« C'est scandaleux, ce projet n'a fait l'objet d'aucune consultation publique, tout s'est fait derrière des portes closes », a dénoncé dans un communiqué Steven Guilbeault, directeur principal chez Équiterre, en réaction à notre reportage.
Équiterre rappelle que « le pétrole issu des sables bitumineux est un pétrole lourd qui coule lorsqu'il entre en contact avec l'eau », contrairement au pétrole léger qui a tendance à flotter ».
« Un déversement de pétrole des sables bitumineux survenu au Michigan en 2010 dans une municipalité de 7400 habitants a causé des dommages de plus d'un milliard de dollars. Quatre ans après l'incident, la compagnie n'a toujours pas réussi à nettoyer le pétrole déversé. Imaginez l'impact sur l'écosystème du fleuve Saint-Laurent! », ajoute M. Guilbeault.
De son côté, la Fondation David Suzuki estime que « cette nouvelle suscite de vives inquiétudes pour la Fondation puisqu'elle pourrait être le prélude à des exportations massives de pétrole lourd sur le fleuve Saint-Laurent, source d'eau potable pour 43 % des Québécois ».
« Il est déplorable que le ministère de l'Environnement ait autorisé l'exportation de pétrole lourd sur le fleuve sans que la population n'en soit informée et sans évaluation environnementale puisque ce projet comporte des risques pour l'environnement et la santé humaine », a affirmé dans un communiqué le directeur de la Fondation au Québec, Karel Mayrand.
Lien: http://ici.radio-canada.ca/regions/montreal/2014/08/04/002-petrole-sables-butimineux-suncor-sorel-tracy.shtml
Tarsands oil is coming on the St. Lawrence River
My translation of an exclusive article to Radio-Canada
Radio-Canada has learned that the oil that Suncor ships to Soret-Tracy by train for the past 3 weeks is a heavy oil, unrefined, product of the Alberta tarsands. Also, for the first time, the company confirms that the tankers are for export. The arrival of this unfamiliar oil in Quebec launches the enforcement of many security measures.
Breaking shrieks ring out at the Kildair location, by the River at Sorel-Tracy (where the Richelieu River ends in the St. Lawrence River). Just like every other day since mid-July, about 30 railcars arrive here in slow motion to unload their oil shipment.
"We transport heavy oil from the West by train to the Montreal refinery since December 2013, but in Sorel, to load ships, this is the first time", confirms Nancy White, spokesperson for Suncor.
For the occasion, Suncor replaced the DOT-111 made famous by the Lac-Megantic disaster with a new generation of tankcars, thicker and more resistant. As for CN, it has reduced the speed of its convoys and inspects rails that go through the Monteregie twice a week.
The Kildair company, that stores the oil before loading it on the tankers, has also updated its security equipment and its infrastructures. "Crude oil is something new for us", explains CEO Daniel Morin, who is in the fuel-oil or bitumen business for many years. "Everybody knows what vegetable soup looks like, but the soup at the corner restaurant is different from any other restaurant".
Kildair has had sprinklers put in every 40 meters along the rails, and has aquired a special intervention railcar in case of a fire, in partnership with the Town of Sorel-Tracy. A protocol is still being prepared to offer assistance to other municipalities of the Monteregie in case of an incident.
"We understand very well why people are worried, after the Lac-Mégantic incident", says Serge Péloquin, mayor of Sorel-Tracy. "But the storing of oil project in Kildair, it has been already a year and a half that our emergency teams are working at it. In Sorel-Tracy, a heavy industrial town, risk is part of our culture."
Suncor and Kildair did not need to go through the provincial environmental public hearings body to be able to transport Alberta oil through Sorel-Tracy. "It has been determined by the governmental authorities that there was no need to do public hearings. We have worked with the Environment Ministry and the Régie du bâtiment (building code regulator) to get all the required permits", explains Kildair CEO Daniel Morin.
The Environment ministry explaines that there are public hearings only for the development of an installation. In this case, Kildair is reusing tanks that are already there. So the company only needed an authorization certificate that it got in December 2013 after security measures had been strenghtened.
Environment
In case of a spill, the heavy crude from the tarsands would be even more damaging to the St. Lawrence than the light oil like the one at Lac-Mégantic. "Bitumen residues are much more difficult, much harder to elminate from a natural environment and much more toxic", explains Émilien Pelletier, professor specialized in chemistry and ecotoxycology at the marine science Institute in Rimouski. He explains that the heavy crude is susceptible to sink faster to the bottom and degrades more slowly from bacteria that shale oil, for example.
International market
The deal between Kildair and Suncor about the loading of the tankers covers many years. "Kildair is offering us more transportation options and better market access", says Nancy White, the spokesperson of the oil company. She explains that the ships will leave Sorel once or twice a month starting in mid-September, heading for north-american reffineries.
Other destinations are under study, but Suncor does not want to reveal any strategic details. On the other hand, the oil company is giving itself the option to also supply its Montreal refinery by going through Sorel. Why the detour? As per our information, it would be because the storage capacity of Montreal is more limited that that of Sorel-Tracy.
Environmentalists are worried
"It is scandalous; this project has had no public consultation, all was done behind closed doors", writes Steven Guilbeault, head director at Équiterre, in a press release reacting to our article.
Équiterre points out that "the oil from the tarsands is a heavy crude that sinks in water", unlike light oil that tends to float".
"A tarsands oil spill that happened in Michigan in 2010 in a municipality of 7,400 caused damages of more than a billion dollars. Four years later, the company still has not been able to clean up all the spilled oil. Imagine the impact on the St. Lawrence River ecosystem!", adds Mr Guilbeault.
As for the David Suzuki Foundation, it thinks that "this news is very worrysome for the Foundation because it could be the beginning of massive exportation of heavy crude on the St. Lawrence River, drinking water source for 43% of the people of the province of Quebec".
"It is deplorable that the Environment Ministry has authorized the exportation of heavy crude on the River without informing the population and without environmental assessment, because this project is risky for the environment and human health", reads a press release from the director of the Foundation in Quebec, Karel Mayrand.
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